Attention pavé.
Je suis policier et confirme que tu peux parfaitement appeler le 17 lorsque tu es confronté à ce type de problème : "Les bruits ou tapages injurieux ou nocturnes troublant la tranquillité d’autrui sont punis de l’amende prévue pour les contraventions de la 3e classe.".
Notre difficulté est cependant la suivante : si l’équipage qui intervient ne constate aucun bruit notable, il ne pourra rien faire d’autre que d’éventuellement aller toquer à la porte du fauteur de trouble pour lui rappeler les règles de savoir-vivre en communauté ; si les collègues décident de le faire ce qui reste à leur discrétion, sans mauvais jeu de mots.
S’ils constatent le tapage, il peuvent verbaliser ton voisin.
Sache que si les collègues tolèrent plus facilement les bruits le jour, j’en connais peu qui admettent qu’on en fasse la nuit (le Code de la Santé Publique le prévoit et le réprime aussi, ce n’est pas un hasard).
Sache aussi que le "nocturne" dans "tapage nocturne", débute à la tombée de la nuit. Il n’est pas question d’horaire à partir duquel on passe du tapage "diurne" au "nocturne". C’est le coucher du soleil qui s’en charge. Cela dit, autant les collègues seront à mon avis intransigeants s’il est une heure avancée de la nuit, ce qui est le cas chez toi, autant à 19h30 ça passera moins…
En sachant cela, tu peux déposer plainte contre ton voisin.
Mais je vais te répéter ce que l’on conseille aux gens qui sont victimes de ce genre de comportements, dans l’ordre parce que le dépôt de plainte devrait être la dernière étape à mon avis :
1. Essayer de régler calmement le problème avec le principal intéressé, ton voisin donc, par tout une tas de moyens possibles et imaginables. Ce que tu as déjà en partie fait, apparemment.
2. Si ça ne mène à rien, discuter avec les voisins de la situation pour savoir s’ils sont aussi gênés par ces bruits. Si ce n’est pas le cas, ça va être compliqué. Si ça l’est, leur conseiller de passer par l’étape 1 si ce n’est pas déjà fait. Plus le voisin verra de monde à sa porte, plus forte la pression sociale sera.
La technique du bon cop/bad cop marche plutôt bien dans ce genre de cas : tandis que l’un est bien sec avec lui, à la limite du désagréable, l’autre reste plus mesuré. Le type risque de rejeter le discours du premier et les arguments du second pourront ainsi s’immiscer plus facilement dans sa petite tête. C’est pas 100% garanti, hein, il peut très bien foutre le bordel pour se venger d’être le vilain petit canard. Mais crois-moi qu’il se tirera tout seul une balle dans le pied à ce moment-là.
Tu es déjà passé par cette étape, je crois ; mais je pense que tu peux creuser encore chez les voisins (pas au premier sens du terme, hein).
3. Prévenir le syndic./propriétaire de la situation, en lui expliquant que tu/vous es/êtes passé(s) par l’étape 1 et 2, qui n’ont rien donné.
Éventuellement évoquer le dépôt de mains courantes/plaintes au commissariat/brigade de gendarmerie si le voisin continue : soit le propriétaire s’en fichera, soit il va se sentir concerné parce qu’il ne veut pas risquer des emmerdes ou au contraire qu’il se sentira réellement concerné par votre problème.
Ne pas se méprendre : le proprio n’est pas responsable du bruit. Il incarne par contre un bon moyen de pression auprès du voisin.
4. Déposer des mains courantes au commissariat/brigade de gendarmerie.
La main courante est un outil mis à votre disposition pour signaler un fait marquant (pas forcément une infraction), souvent pour plus tard (en cas de plainte ultérieure ou confrontation auprès d’un juge par exemple). La main courante ne conduit normalement à aucune poursuite pénale, ce qui signifie que ni les collègues ni la justice n’inquiéteront ton voisin.
J’insiste : chaque voisin importuné doit déposer de son côté une main courante, pour qu’un dossier épais soit prêt au cas où.
Pour être le mieux reçu par les collègues, ne pas en déposer trop souvent et le faire dans les horaires de bureau si possible. Amener ses papiers d’identité et récupérer le maximum de détails sur le tapage que vous voulez signaler : heure de la nuit, durée, nature, comment vous avez réagit, etc.
4bis. Appeler le 17 et signaler le tapage à l’opérateur radio, qui détachera s’il le peut un équipage pour venir constater le bruit.
Je ne vais pas te mentir : pour un certain nombre d’entre nous, intervenir sur un tapage n’est pas très intéressant parce qu’on ne courre pas après le voleur qui a tiré le sac de mamie et qu’on doit régler un problème qui pourrait se régler entre vous. La loi nous demande de le réprimer, on le fait par devoir et aussi parce qu’on sait très bien que c’est insupportable, pour le vivre pour certains de notre côté aussi.
Dans le même ordre d’idée que plus haut, ne pas composer le 17 au moindre bruit : vous allez saouler l’opérateur qui risque plus de finir par vous ignorer gentiment que de se sentir concerné par le problème (ça me fait penser : le requérant qui appelle quinze fois en dix minutes pour le même fait, on ne pourrait pas qualifier ça d’appels téléphonique malveillants… ?!).
Un petit truc qui marche bien au téléphone lorsqu’on a le 17 au fil : une phrase du style "je suis désolé de vous appeler pour ça, vous avez sûrement des choses plus importantes à gérer mais j’ai mon voisin qui fait du bruit. Il est 2h du mat’ et je suis déjà allé le voir à plusieurs reprises, sans résultat. Si vous pouvez envoyer un équipage pour lui faire entendre raison, ça serait vraiment gentil. Ça devient de plus en plus insupportable, j’ai déjà déposé des mains courantes à ce propos et mes voisins l’ont fait aussi. J’aimerais que vous marquiez le coup cette fois-ci."
Cette botte secrète ne doit pas être utilisée trop souvent, comme l’a bien expliqué Karadoc à Perceval.
Donner l’adresse, code d’accès de l’immeuble, votre étage et celui du voisin. Préciser s’il vit seul ou non, a un animal potentiellement dangereux et à votre connaissance, des armes si vous pensez que ça peut partir en couilles avec les collègues. Je n’écrit pas ça forcément pour toi, Gabbro, mais aussi pour ceux qui liront ce message et qui pensent être dans cette situation. Des fêtards où il y a alcool/stups et où les gars ont déjà été agressifs avec le voisinage, par exemple.
5. Demander une médiation auprès de la mairie. Je n’ai jamais eu de retours donc je ne sais pas si ça fonctionne bien mais ça ne coûte rien d’essayer.
6. Déposer plainte au commissariat/brigade de gendarmerie, en expliquant que vous (les autres voisins et toi, déposez plainte chacun de votre côté ; mais certains ne suivront peut-être pas pour les raisons évoquées plus bas) êtes passés par toutes les étapes précédentes sans succès et que vous voulez vraiment que les tapages cessent.
C’est une étape sensible parce que symboliquement, la guerre est déclarée : le voisin risque d’être convoqué et devra s’expliquer devant un collègue, sera peut-être renvoyé devant le tribunal de police et écopera d’une amende, au plus.
La décision de déposer plainte devrait être mûrement réfléchie pour cette raison : est-ce que tu veux aller jusque là ?
Attention, je n’essaye pas de te dissuader de le faire, bien au contraire ; mais il faut que tu saches que tu n’auras plus la main sur la suite des évènements. Certes, tu peux toujours retirer ta plainte mais il faudrait que ça soit pour une bonne raison : il a déménagé, s’est engagé à FERMER SA GUEULE en signant un papier de son sang pour prouver sa bonne foi… etc.
Si je hiérarchise ainsi les étapes, rien ne t’empêche de revenir à celle d’avant si la situation s’améliore où d’en retenter une de temps en temps, notamment la discussion avec l’intéressé (1).
Certains ont évoqué l’intervention d’un huissier. L’idée n’est pas mauvaise mais le mettre en pratique est quasiment irréalisable.
Tu peux toujours filmer les faits depuis chez toi, en guise de preuve, mais le tribunal s’en foutra très probablement parce que ça n’est pas admis. Par contre pour prouver aux collègues que t’es pas un mytho qui veut juste emmerder ton voisin et te les mettre dans la poche, pourquoi pas. Bon après, en général c’est vite réglé lorsqu’on intervient : pas bruit, on s’en va ; bruit, on verbalise et on s’en va.
Si tu as des questions.