Enseigner les Mathématiques

a marqué ce sujet comme résolu.

Pour moi il faut inscrire l'enseignement des mathematiques dans une vision beaucoup moins utilitariste mais historique, comme construction de la pensee au cours de l'Histoire. Comment saisir l'importance si ce n'est la necessite de l'analyse de Fourier sans introduire son contexte historique ? Comment saisir l'importance du calcul integral sans aborder a minima les besoins de Newton, la necessite des notations introduites par Leibniz, etc. Les mathematiques n'echappent pas a l'orientation d'une epoque, des contemporains et une necessite des concepts ou a defaut un environnement propice a l'elaboration des concepts (il faut avoir du temps a perdre, etre un bon aristocrate avec des servants pour se permettre de traiter toute la journee de la geometrie lemniscatique au 17 ou 18eme siecle).

Le probleme est a mon sens qu'on ne donne aucune envie d'apprendre en lancant des formules magiques sortis du chapeau comme si c'etait une evidence. Rappelez-vous que ce qu'on apprend en CPGE, bien que tres vieux est tout de meme le resultat d'annees de sacrifices individuelles et de tourmentes intellectuelles de la part de centaines de mathematiciens durant des siecles. Un excellent professeur que j'ai pu avoir en theorie de la mesure, en equivalent L3, Erik Lenglart1 pour ne pas le citer, rassurait ses eleves a la fin du cours en disant: "ne vous inquietez pas si cela vous semble difficile, cela semblait egalement extremement difficile pour les mathematiciens du debut du XXieme siecle. Vous en savez autant sur la theorie de la mesure que les plus grand noms de cette epoque".

Un grand probleme est que l'on ne donne pas les clefs de comprehension dans les cours pour en comprendre la portee. On donne simplement de quoi faire manipuler des equations. C'est valable tres generalement en sciences: combien d'eleves de CPGE et d'ecole d'ingenieurs ont une vision aristotelicienne de la mecanique. Pour reprendre l'exemple d'Etienne Klein dans beaucoup de ses conferences, prenons un systeme Soleil / Terre, dont les deux corps ne sont soumis qu'a la force de gravite. Posez la question: que se passe-t-il lorsque l'on remplace la Terre par une theiere, et observez un tiers de theiere qui partent a l'infini, un tiers de theiere qui s'ecrasent sur le soleil et un tiers de gens qui ne se prononcent pas. C'est a dire que ces gens la ont vu les equations de la gravitation, savent faire un PFD mais sont incapables d'en saisir les implications et de penser les equations. La reponse est pourtant evidente a la vue des equations: le mouvement d'un corps dans un champs gravitationnel ne depend pas de sa masse2.

Comment remedier a cela ? Alleger allegrement les programmes de CPGE et scolaires pour eviter de former des machines de calcul sans aucun recul, et forcer la construction de la pensee et la conceptualisation des idees simples sous-jacentes en contextualisation le cours dans un environnement historique depassable et en guidant l'eleve dans les implications des concepts sous-jacents (c'est le "depassable" du contexte historique).
A defaut d'etre la solution miracle, cela permettrait au moins aux eleves de comprendre, et je renvoie une nouvelle fois a Etienne Klein, que les sciences ne sont pas faites par des ruptures conceptuelles introduitent par des genies presque resultat d'un hasard genetique, mais le fruit d'une comprehension superieure de ce qui etait deja present dans les travaux acceptes par ses contemporains. C'est a dire que Galileo prouve l'independence de la masse dans la chute libre des corps par une incoherence logique de la pensee d'Aristote, Einstein developpe la relativite par une meilleure comprehension de ce qui est DEJA inscrit dans les equations newtoniennes (et peut etre par une influence de Poincare et de ses travaux geometriques - a verifier, je ne voudrais pas dire de betise), etc.


  1. Petite anecdote par rapport au premier message de Vayel pour initier ce message. Ce professeur refusait les phrases debutants par "On dit que […]" en se moquant "Ha bon ? C'est une rumeur ?", ce qui montre en quelque sorte le rejet des definitions dogmatiques. A savoir qu'il donnait assez rarement les noms des theoremes qu'il enseignait (ceux portant un nom de mathematiciens, pas ceux du type theoreme spectral, theoreme ergodique, etc.), sauf quelques tres importants et les nomme par rapport a l'idee qu'ils representent. C'est ainsi que j'ai appris 3 ans plus tard le nom du Théorème de Radon-Nikodym alors que j'en connaissais le contenu, l'utilisation et les demonstrations. 

  2. Notons $m_1$ et $m_2$ respectivement la masse de la Terre et du Soleil. On rappelle que la force de gravitation attractive qui s'applique a un objet de masse $M_1$ par un objet de masse $M_2$ eloigne d'une distance $d$ s'exprime par $F = G\frac{M_1 M_2}{d^2}$ avec $G$ constante (modulo une notation vectorielle correcte). On peut deduire la position de la terre par rapport a son acceleration par simple double-integration. Un petit PFD sur la Terre nous donne $m_1 a = \text{Somme des forces}$, avec $a$ acceleration de la terre, c'est a dire en l'occurrence uniquement la force de gravitation: $m_1 a = G\frac{m_1 m_2}{d^2}$. On voit bien que $m_1$, la masse de la Terre, se simplifie. 

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La reponse est pourtant evidente a la vue des equations: le mouvement d'un corps dans un champs gravitationnel ne depend pas de sa masse2.

Ce que tu dis là n'est valable qu'à court terme si une des masses est négligeable devant l'autre. Dans le "vrai" système solaire, remplace Jupiter par une théière, tu vas avoir rapidement des problèmes. Parce que si la théière subit la même accélération que Jupiter, cette dernière ne fait pas subir la même accélération aux autres corps présents. L'évolution des deux systèmes diverge alors exponentiellement. Et là, pour dire si cette théière va gicler à l'infini, se crasher sur le Soleil, ou être déplacée sur une autre orbite, c'est pas évident. Par contre, on peut dire de manière certaine que son destin dépendra effectivement de sa masse.

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Ce qu'a essayé de dire Höd et qui est tout à fait juste, c'est que l'enseignement scientifique, en particulier de la physique et des mathématiques est mal fait.

Il y a une barrière de la langue (quasiment tout s'écrit en langage mathématique) et la traduction que l'on en fait dit le contraire de ce que ça signifie.

Par exemple la production d'énergie, un contre-sens employé par les journalistes "scientifiques" lors de la question de la transition énergétique. Il y a donc eu un problème dans l'enseignement qui fait qu'on comprend trop de choses de travers.

Oui, j'avais bien compris le message général avec lequel je suis parfaitement d'accord. Mon point, c'est justement qu'il faut bien faire gaffe avec l'interprétation des formules physiques et ne pas faire d'un cas limite une généralité (en la qualifiant d'évidence au passage ^^ ). Ça fait parti des travers à éviter pour enseigner cette matière correctement.

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Le probleme est a mon sens qu'on ne donne aucune envie d'apprendre en lancant des formules magiques sortis du chapeau comme si c'etait une evidence. Rappelez-vous que ce qu'on apprend en CPGE, bien que tres vieux est tout de meme le resultat d'annees de sacrifices individuelles et de tourmentes intellectuelles de la part de centaines de mathematiciens durant des siecles. Un excellent professeur que j'ai pu avoir en theorie de la mesure, en equivalent L3, Erik Lenglart[^1] pour ne pas le citer, rassurait ses eleves a la fin du cours en disant: "ne vous inquietez pas si cela vous semble difficile, cela semblait egalement extremement difficile pour les mathematiciens du debut du XXieme siecle. Vous en savez autant sur la theorie de la mesure que les plus grand noms de cette epoque".

Un grand probleme est que l'on ne donne pas les clefs de comprehension dans les cours pour en comprendre la portee. On donne simplement de quoi faire manipuler des equations. C'est valable tres generalement en sciences: combien d'eleves de CPGE et d'ecole d'ingenieurs ont une vision aristotelicienne de la mecanique. Pour reprendre l'exemple d'Etienne Klein dans beaucoup de ses conferences, prenons un systeme Soleil / Terre, dont les deux corps ne sont soumis qu'a la force de gravite. Posez la question: que se passe-t-il lorsque l'on remplace la Terre par une theiere, et observez un tiers de theiere qui partent a l'infini, un tiers de theiere qui s'ecrasent sur le soleil et un tiers de gens qui ne se prononcent pas. C'est a dire que ces gens la ont vu les equations de la gravitation, savent faire un PFD mais sont incapables d'en saisir les implications et de penser les equations. La reponse est pourtant evidente a la vue des equations: le mouvement d'un corps dans un champs gravitationnel ne depend pas de sa masse[^2].

Comment remedier a cela ? Alleger allegrement les programmes de CPGE et scolaires pour eviter de former des machines de calcul sans aucun recul, et forcer la construction de la pensee et la conceptualisation des idees simples sous-jacentes en contextualisation le cours dans un environnement historique depassable et en guidant l'eleve dans les implications des concepts sous-jacents (c'est le "depassable" du contexte historique).

Tu ne peux pas prendre un exemple aussi trivial (poser une question de mécanique à des ex-prépa en dehors de tout contexte) et conclure qu'il faut simplifier/alléger les programmes de prépa, ou même de lycée. D'abord, le but de la prépa n'est pas de former des scientifiques, mais de faire passer un concours à des gens. C'est idiot, mais c'est comme ça. Si tu veux que ce concours évalue la capacité des gens à faire de la science, change le concours, ensuite on adaptera le programme - mais pas forcément en l'allégeant.

Ensuite, le problème du lycée ne vient pas du fait que les programmes sont trop chargés. Je suis d'accord avec ce que ton exemple implique (les élèves ont du mal à faire le lien entre les équations et le monde réel, ce qui conduit à se demander ce qu'ils retiennent de leur cours de physique), mais le problème ne vient pas des capacités intellectuelles des élèves. Ici encore, adapter le programme et la façon d'enseigner ça ne revient pas forcément à diminuer la charge de travail. On peut plutôt réfléchir à comment donner une meilleure intuition aux élèves, par exemple avec un outil informatique (toi aussi, programme ta simulation de système solaire ! Ou change juste quelques constantes dans ce programme codé par le prof) ou avec davantage de séances de TP qui impliquent de retrouver soi-même des lois empiriques (et moins de séances consacrées à l'oxydo-réduction, SVP).

Remarque que c'est une dimension de l'enseignement que les profs de lycée et de prépa commencent timidement à explorer.

La reponse est pourtant evidente a la vue des equations: le mouvement d'un corps dans un champs gravitationnel ne depend pas de sa masse2.

Ce que tu dis là n'est valable qu'à court terme si une des masses est négligeable devant l'autre. Dans le "vrai" système solaire, remplace Jupiter par une théière, tu vas avoir rapidement des problèmes. Parce que si la théière subit la même accélération que Jupiter, cette dernière ne fait pas subir la même accélération aux autres corps présents. L'évolution des deux systèmes diverge alors exponentiellement. Et là, pour dire si cette théière va gicler à l'infini, se crasher sur le Soleil, ou être déplacée sur une autre orbite, c'est pas évident. Par contre, on peut dire de manière certaine que son destin dépendra effectivement de sa masse.

@dri1

Digression pour digression, j'ai précisé dans l'énoncé un couple de corps soumis uniquement à la gravité de chacun des objets: tout se complique évidemment de manière inextricable avec déjà 3 corps, mais jusqu'à preuve du contraire, au lycée et en CPGE on n'étudie que des systèmes binaires ou des systèmes plus complexes sous des hypothèses tellement réductrices qu'on est dans le domaine de la fable. Tu peux faire un PFD sur le Soleil si tu veux ou bien changer le réferentiel, si tu procèdes par le remplacement d'un objet et étudie son mouvement, alors peu importe la masse de celui-ci, en mécanique newtonienne, le mouvement sera le même.

Tu peux faire un PFD sur le Soleil si tu veux ou bien changer le réferentiel, si tu procèdes par le remplacement d'un objet et étudie son mouvement, alors peu importe la masse de celui-ci, en mécanique newtonienne, le mouvement sera le même.

Nope. Prends une étoile double, en considérant le système isolé et avec que de la gravitation newtonienne. Remplace une des deux étoiles par une théière. En faisant ça, tu déplaces suffisamment le barycentre du système pour tout foutre en l'air.

C'est enfantin à voir, il suffit de faire le PFD non pas en remplaçant un objet léger par un autre objet léger en considérant l'objet lourd comme le barycentre du système, mais en utilisant le vrai barycentre du système pour faire le PFD. La première étoile conserve son équation lorsqu'on la transforme en théière $a_1=G\dfrac{M_2}{r^2}$, mais l'autre étoile passe de $a_2=G\dfrac{M_1}{r^2}$ à $a_2=G\dfrac{M_t}{r^2}$. Du coup, $r$ change aussi, et ça fout le boxon.

C'est bien pour ça qu'il faut être très prudent quand on manipule des formules de physique, sinon on fait des hypothèses grossières dont on n'a pas conscience et on se retrouve à avoir des a priori absurdes sur des systèmes.

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Hého prenez une chambre svp.

Détends toi. ^^ Ça illustre exactement ce que Höd dit : la science mérite d'être clairement mieux enseignée, et pour ça il faut apprendre aux gens à interpréter les formules correctement, et à ne pas sortir d'évidence du chapeau en masquant les hypothèses/axiomes/whatever sous-jacents.

Je suis d'accord, mais je ne vois pas comment on pourrait faire cela sans diminuer le volume de choses à savoir. Je ne dis pas qu'il ne faudrait pas baisser le nombre de notions abordées, mais simplement qu'il faut faire un choix entre beaucoup de précisions et prendre du temps pour faire des belles sciences comme on les aime, et passer sous silence un certain nombre de concepts, éventuellement importants, afin d'avoir un tour d'horizon plus complet de ce qui existe.

On pourrait rajouter une infinité de complications: la terre tout comme le Soleil ne possèdent pas de distribution de masse symétrique, ce qui fait que l'on ne peut pas considérer les corps comme ponctuels et donc de toute manière on néglige un tas de choses qui de toute manière n'ont pas bien d'importance pour les petites applications mais qui invalident les équations de Newton si l'on faisait le calcul correctement (et si l'on savait le faire).

De toute manière ce qu'il faut faire ressortir c'est justement, contrairement à ce que disait katana, la dissociation entre le monde réel et les équations. La plupart des principes décris par les équations sont contre-intuitifs voire vont contre l'observation: je n'ai jamais vu de mouvement rectiligne uniforme, lorsque je laisse tomber deux objets de même masse mais de forme différente, l'observation invalide une chute des corps indépendantes de la masse, etc. Ce n'est pas tellement l'intuition qu'il faut développer, car mon intuition si elle se base sur l'observation est pratiquement à chaque fois mise à défaut, mais la goût pour le vrai. Ce qui fait la différence entre Galileo et Aristote c'est que le dernier ne s'est pas posé la question de savoir si la loi d'Aristote était conforme à l'observation mais si elle était vraie.

Je n'ai jamais supposé que la capacité intellectuelle des élèves étaient en cause, mais plutôt l'environnement, la manière dont en enseigne et le contenu des enseignements. Et si je peux tirer une conclusion assez générale sur la surchage des programmes en France quand j'ai des dizaines d'exemple de cet acabits pour mettre à défaut la compréhension de gens qui sont censés avoir compris, que les expériences de programmes plus légers mais mieux enseignés fonctionnent ailleurs. Alors on peut se gargariser d'avoir quelques hurluberlus qui s'en sortent bien part la suite et redorent le blason français en terme de médailles et de prix, mais à quel prix ? Au prix de l'éducation des millions d'autres - le principe même de la CPGE que tu décris, entraîner pour des concours mais pas former des scientifiques, est vraiment malheureux mais je pense que le problème commence bien plus tôt, notamment au lycée.

À titre personnel j'ai appris beaucoup beaucoup de choses en dehors des bancs de mes cours obligatoires. Je pense que si on approche correctement quelques notions, les élèves seront mieux capables par la suite de faire des maths par eux même.

Et comme les études c'est censé durer que quelques années … ça me paraît une bonne solution.

Quelque chose aussi qui manque énormément, c'est le contact avec des chercheurs. En prépa n'en parlons pas, mais même à la fac très peu d'élèves osent aller parler à des chercheurs, leur poser des questions sur leur métier, sur les maths qui pourraient les intéresser .... avoir du contact humain quoi !

Ça participe au phénomène "les maths c'est la mort" alors que les chercheurs en maths sont très nombreux à être chaleureux et avec la porte ouverte. Ça m'est même arrivé qu'un chercheur vienne me chercher juste pour parler d'un problème … comme quoi ça pourrait être utile et agréable aux deux partis.

Bonsoir, Je suis ce fil de très loin depuis plusieurs jours, et je vais finalement mettre mon grain de sable, et excusez moi par anvance si je répète des choses qui ont déjà été développées. Dans un sujet qui parle de l'enseignement, vous avez dévié vers l'enseignement supérieur, ou l'enseignement en lycée. Le problème, c'est que quand les gamins ont 15 ans et sont au lycée, tout est déjà joué ou presque.

Et au collège, il y a beaucoup de notions qu'on apprend en 6ème , puis qu'on apprend à nouveau en 5ème, en 4ème. On pourrait certainement profiter de ces révisions pour proposer une nouvelle présentation. Typiquement, l'identité remarquable (a+b)² = … peut être présentée par un dessin très explicite, et idem (a+b) au cube.

Je crois pas qu'on ait tant oublié que ça les collégien (et primaires). En fait, ce sera même plus facile à discuter si on se mettait d'accord sur une politique pour le lycée et post-bac.

Et ce, pour une raison assez simple, les maths de collège préparent celles du lycée (pro ou pas d'ailleurs). Comme il y a un gros souci au lycée (mystification des maths, mauvais programmes et traitements), le régler permettrait d'y voir plus clair pour les années antérieures.

De toute manière, dans l'idéal, il faudrait presque tout changer. Ça n'aurait pas de sens de garder le lycée ou collège tel qu'il est et changer le reste.

Bonsoir, Je suis ce fil de très loin depuis plusieurs jours, et je vais finalement mettre mon grain de sable, et excusez moi par anvance si je répète des choses qui ont déjà été développées. Dans un sujet qui parle de l'enseignement, vous avez dévié vers l'enseignement supérieur, ou l'enseignement en lycée. Le problème, c'est que quand les gamins ont 15 ans et sont au lycée, tout est déjà joué ou presque.

Et au collège, il y a beaucoup de notions qu'on apprend en 6ème , puis qu'on apprend à nouveau en 5ème, en 4ème. On pourrait certainement profiter de ces révisions pour proposer une nouvelle présentation. Typiquement, l'identité remarquable (a+b)² = … peut être présentée par un dessin très explicite, et idem (a+b) au cube.

elegance

Étant d'un naturel plutôt positif je ne dirais pas que tout est joué, mais en effet, rendu au Lycée, beaucoup de choses sont déjà pliées ^^ . Tu sais, chaque prof a sa façon d'aborder une notion, je dirais même que selon les classes, les niveaux ou le moment de l'année, un même prof n'aborde pas la même notion de la même façon. Par exemple, j'aborde la formule $k (a + b)=ka +kb$ en demandant aux élèves de calculer de tête une opération du type $6 \times 17$ et en m'expliquant leur façon de procéder. Je leur demande également de calculer l'aire d'un rectangle partagé en deux "sous-rectangles". Partant de là, j'établis la formule en dédramatisant la situation ("ce n'est rien de plus que ce que vous faite intuitivement"). Cela fait sens, mais ne dure pas. L'utilisation de variables chasse rapidement tout cela. Mais c'est normal. Les gamins n'ont pas que les Maths dans la vie, ils ont également besoin de mûrir pour digérer et assimiler ces notions, et puis il n'est pas simple ou naturel pour un gosse de ramener un problème de calcul littéral à un problème de calcul numérique et encore moins à un problème géométrique.

De même, pour répondre à Höd, ce n'est pas parce que l'élève a compris l'enjeu historique d'une notion qu'il la maîtrise. On peut expliquer en long en large et en travers que les logarithmes ont été créés pour ramener le calcul de longues multiplications au calcul de simples additions, cela n'empêchera pas des gamins d'écrire que $log(1 + x) = log(1) \times log(x)$ ou $log(1 + x) = log(1) + x$ ou encore que si $log(x) = k$ alors $x = \frac{k}{log}$ ! Je suis entièrement d'accord sur le fait que la perspective historique donne du sens aux Maths tout autant que le côté utilitariste et que cela accroche certains élèves férus d'Histoire. Mais ce n'est pas non plus la panacée réglant tous les problèmes. Encore une fois, il n'y a pas de méthode miracle. La solution réside davantage dans un savant mélange de toutes ces idées, un mix propre à l'enseignant qui lui permet de toucher le plus d'élèves possibles.

Je crois pas qu'on ait tant oublié que ça les collégien (et primaires). En fait, ce sera même plus facile à discuter si on se mettait d'accord sur une politique pour le lycée et post-bac.

Et ce, pour une raison assez simple, les maths de collège préparent celles du lycée (pro ou pas d'ailleurs). Comme il y a un gros souci au lycée (mystification des maths, mauvais programmes et traitements), le régler permettrait d'y voir plus clair pour les années antérieures.

De toute manière, dans l'idéal, il faudrait presque tout changer. Ça n'aurait pas de sens de garder le lycée ou collège tel qu'il est et changer le reste.

Holosmos

De nombreux gamins n'atteignent pas le fameux Lycée général et technologique, un gros pourcentage s'orientant vers l'apprentissage, le Lycée pro ou quittant même purement et simplement le système scolaire. Pour le Lycée GT ou le post-bac, le problème du "j'aime pas les Maths" peut se régler par le choix de la filière. Le soucis se pose davantage au collège à mon sens où le programme de Math n'a pas vraiment été repensé (on peut critiquer celui du Lycée, mais il me semble plus cohérent et structuré). On constate beaucoup d'anomalies au collège. Triangles, quadrilatères et angles sont abordés en sixième (mais aussi en primaire) mais on attend la 3ème pour parler des polygones réguliers (alors qu'il faudrait parler de pyramide régulière en 4ème !?!). On réapprend à mesurer les distances entre les points en 6ème, puis on apprend à se passer de la règle pour calculer les longueurs. Mais en 4ème, patatras!, il faut apprendre à remesurer les distances, entre les points et les droites cette fois ! On apprend à tracer des perpendiculaires, médiatrices et bissectrices en 6ème et les tangentes à un cercle en 4ème ! La proportionnalité est traitée tout au long du collège, mais il faut apprendre la notation puissance, les puissances de 10, de nombres positifs, de nombres négatifs, à exposant positif et négatif ainsi que les propriétés de simplification des puissances (ouf) en une seule année !

Je pourrais multiplier ces exemples à l'envie mais je n'ajouterai qu'une dernière chose : non le collège n'a pas vocation à préparer au Lycée, tous les gamins n'y allant pas. D'ailleurs quel Lycée faudrait-il préparer ? Je ne suis pas certain qu'apprendre le cosinus serve à plus de 40% des élèves. Et pourtant, il est absolument nécessaire dans plusieurs filières du Lycée. Il en va de même des fonctions et de l'algèbre. J'en reviens donc à l'un de mes précédents posts : quel objectif fixe-t-on au collège et à son enseignement de Math ? Préparer au Lycée en perdant 60% des gosses ou donner un bagage minimal mais solide et partagé par 90% des élèves ? D'ailleurs, faut-il enseigner la même chose à tout le monde ? J'avoue ne pas avoir la réponse à ces questions qui pourtant sont, je pense, fondamentales :)

Le système scolaire est mal pensé pour les élèves qui quittent la filière générale. D'ailleurs c'est la filière plébiscité. Quelle honte si un enfant part faire menuiserie !

Le problème étant que les parents refusent catégoriquement (parce que c'est devenu culturel) d'accepter le fait que son enfant peut ou pas faire ce que les parents veulent. Dans d'autres pays la répartition vient beaucoup plus tôt que chez nous (vers un équivalent la 6e je crois ?) et ça donne déjà une situation beaucoup plus seine pour mettre au point des programmes.

Parce que voilà, en tant que futur ministre de l'éducation, je trouve ça méga galère de faire un programme de maths pour le collège pour des élèves qui vont faire des choses totalement différentes.

Je pourrais multiplier ces exemples à l'envie mais je n'ajouterai qu'une dernière chose : non le collège n'a pas vocation à préparer au Lycée, tous les gamins n'y allant pas. […] J'en reviens donc à l'un de mes précédents posts : quel objectif fixe-t-on au collège et à son enseignement de Math ? Préparer au Lycée en perdant 60% des gosses ou donner un bagage minimal mais solide et partagé par 90% des élèves ? D'ailleurs, faut-il enseigner la même chose à tout le monde ? J'avoue ne pas avoir la réponse à ces questions qui pourtant sont, je pense, fondamentales :)

Kaji9

Personnellement, je ne vois pas la différence entre préparer au lycée et enseigner un bagage minimal, et encore moins pourquoi l'un aurait 60% de réussite et l'autre 90%. Surtout que près de 90% des élèves pourraient avoir un niveau largement supérieur à celui nécessaire pour préparer le lycée actuel si on revoyait les programmes et qu'on mettait aux oubliettes les "situations-problèmes", tâches complexes et autres démarches par découverte glorifiées dans les programmes de mathématique actuels (dont l'inventeur lui-même disait, à propos de l'utilisation qui en est faite, qu'il s'agissait de la pire manière de redécouvrir ce que l'humanité a mis des siècles à acquérir).

Et je vois encore moins pourquoi tous les élèves de collège ne devraient pas recevoir le même enseignement, sous prétexte que certains iront au lycée et pas d'autres. La logique de l'orientation en France est absolument catastrophique, et et l'existence de filière ne doit pas devenir une excuse pour avoir une formation intellectuelle de bas-étage, sans ambition !

Surtout quand on sait que la grosse majorité des détenteurs d'un bac/BTS professionnel ou technique poursuivent des études à l'université en filières générales ! De nos jours, le besoin de diplômes pour trouver un emploi fait que la logique des filières cristallisée par l'éducation nationale ne tient plus : les élèves de filières professionnelles ou techniques aspirent à poursuivre des études universitaires (voire plus) auxquelles ils ont droit, et auxquelles ils doivent être formés. Dans ces conditions, séparer préparation aux études futures et instruction d'un socle intellectuel minimal décent ne sont que la face d'une même pièce.

En tout cas, si l'école est censée donner un bagage minimal pour devenir un citoyen, partagé par 95% des élèves (j'ose), le niveau en mathématique devra être sacrément relevé comparé à ce qu'il est aujourd'hui. Parce qu'une bonne formation du citoyen ne se limite pas à du lire, calculer et compter, mais doit aussi incorporer de solides bases en sciences, économie, et autres matières qui demandent des pré-requis mathématiques assez poussés, surement plus poussés que ce qui est vu actuellement au collège.

Je sais qu'à l'heure actuelle, toutes les filières n'ont pas ces enseignements : par exemple, en filière STI, je n'ai eu aucun cours d'économie ou d'histoire et ça me manque sacrément pour interpréter le monde actuel (mais heureusement que j'ai eu une formation mathématique suffisante pour me renseigner sur le sujet…). Dans l'idéal, on devrait avoir un ensemble de matières socles, partagées dans toutes les filières, avec un enseignement identique pour tout le monde. Les matières de la spécialité ne devant être enseignée en parallèle de ces matières socle, et pouvant différer suivant les filières.

Il y a de nombreux pays où cela fonctionne, avec un collège et lycée unique. Ce sont ces pays qui cartonnent dans les classements PISA et autres comparaisons internationales. Et c'est confirmé par les études sur le niveau de culture générale et économique de la population. Les sociologues de l'éducation ont clairement identifié les mécanismes qui font que la présence de filières diminue fortement le niveau d'instruction moyen de la population : les méthodes et contenus enseignés sont différents suivant les filières, en étant systématiquement plus indigents dans les filières non-générales. Et ce quelque soit le pays qui utilise des filières d'orientation. Pour résumer, c'est le même mécanisme qui est à l’œuvre dans les classes de niveau, et qui fait qu'un enseignement homogène nuit aux élèves peu performants.

Après, si on veut raisonner selon la logique qui fait que l'on trouve anormal que des matières socles comme les mathématiques ou l'histoire ne soit pas enseignés à tous… Cela me rappelle un peu la médiatisation de la suppression de l'histoire en terminale S, alors que personne ne disait rien sur son absence dans les filières STI et autres. Ça m'avait laissé un peu l'idée que certains veulent que ceux qui vont dans les métiers manuels ou techniques ne doivent pas savoir plus que le fameux "lire, écrire, compter". Élitisme, quand tu nous tiens !

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Dans l'idéal, on devrait avoir un ensemble de matières socles, partagées dans toutes les filières, avec un enseignement identique pour tout le monde.
(…)
Il y a de nombreux pays où cela fonctionne, avec un collège et lycée unique.
(…)
Pour résumer, c'est le même mécanisme qui est à l’œuvre dans les classes de niveau, et qui fait qu'un enseignement homogène nuit aux élèves peu performants.

Il y a quelque chose que j'ai raté, ou bien tu proposes vraiment un enseignement identique pour tout le monde pour arriver à percer dans les classements, quitte à laisser les élèves peu performants sur le carreau ?

Ou alors tu voulais dire "hétérogène". Mais alors dans ce cas, tu vas forcément tout niveler par le bas, sinon tout les élèves médiocres se verront refuser l'entrée dans les écoles, auxquelles ils ont droit comme tu le dis toi même.

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Il faut surtout un collège plus modulable : l'élève qui comprend les identités remarquables en 2 h de cours n'a pas besoin de 6 h. Mais peut-être voudra-t-il 2 h de français supplémentaires pour mieux maîtriser le conditionnel passé. À l'inverse, l'élève très bon en histoire n'a pas forcément besoin de 3 h pour cerner les enjeux d'un document.

Il faut arrêter de raisonner en terme de volume horaire mensuel ; c'est en terme de notions à acquérir qu'il faut penser. Surtout au collège, où le socle est vraiment commun. Au lycée, le tri est fait de façon naturelle en fonction des centres d'intérêts des élèves.

Au lycée, le tri est fait de façon naturelle en fonction des centres d'intérêts des élèves.

Pour avoir revu mes anciens prof' la semaine dernière, je te certifie que c'est faux. La filière scientifique est considérée comme « la meilleur », donc des élèves qui n'aiment pas les maths y vont, car ils ont un niveau suffisent dans les autres matières. Malheureusement, les maths servent à sélectionner les élèves dans pas mal de cursus absolument pas mathématiques, ce qui donne des situations ubuesques (la filière médecine étant le concentré de toute les aérations du système).

Après, sur les reste du sujet, je ne sais pas quoi dire : je fait partie des élèves qui ont tous compris jusqu'au lycée sans problèmes. La seul chose que je peux appuyer, c'est que re-re-revoir des notions qu'on a déjà comprises, c'est chiant (là, je pense au collège).

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Ce que tu dis est vrai. J'aurais dû être plus clair. En théorie, le tri devrait être fait de façon naturelle en fonction des centres d'intérêts des élèves. Du point de vue institutionnel est administratif, tout est prévu pour que cela marche ainsi, et à mon sens c'est plutôt intelligent.

Le problème provient évidemment des enseignants, mais aussi des parents, de tout le monde en fait. On se tire une balle dans le pied à force de prétendre que personne ne peut réussir dans la vie sans savoir calculer une dérivée. Évidemment, c'est bien d'être curieux et de savoir que ça existe. Mais je ne vois pas bien l'intérêt d'envoyer un journaliste politique calculer des intégrales. Par contre, il est crucial que le journaliste soit sensibilisé aux problématiques scientifiques (cf. plus haut avec l'exemple de la production d'énergie).

Il y a quelque chose que j'ai raté, ou bien tu proposes vraiment un enseignement identique pour tout le monde pour arriver à percer dans les classements, quitte à laisser les élèves peu performants sur le carreau ? Ou alors tu voulais dire "hétérogène". Mais alors dans ce cas, tu vas forcément tout niveler par le bas, sinon tout les élèves médiocres se verront refuser l'entrée dans les écoles, auxquelles ils ont droit comme tu le dis toi même.

@dri1

Les pays performants dans les comparaisons internationales laissent moins de personnes que nous sur le carreau, alors que leurs exigences en termes de performances et de savoirs acquis sont largement supérieures aux nôtres. La différence, c'est qu'au lieu de penser que le niveau des élèves doit rester ce qu'il est et de calibrer les exigences en fonction du nombre de laissés-pour-compte, ces pays préfèrent penser à l'objectif à atteindre (ce que les élèves doivent savoir et comprendre) et me demander quels sont les moyens pour y arriver. Et il vaut mieux faire comme eux, à savoir : niveler vers le haut, avec un enseignement identique pour tout le monde, tout en diminuant le nombre de personnes laissées sur le carreau.

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