Un zeste de logique

a marqué ce sujet comme résolu.

Ce que veut dire Looping, et je suis d'accord, c'est que : "Je suis petit" est vrai, "Il y a de la neige en Antartique" aussi, donc d'après la table de vérité, "Je suis petit" implique "Il y a de la neige en Antartique" est vrai. Pourtant, il n'y a pas de raison que ma taille ait des conséquences sur le climat du pôle.

Et avec ce raisonnement, deux propositions quelconques vraies s'impliquent. Ainsi, si on en croit la table de vérité : comme la fonction exponentielle est continue et dérivable sur $\mathbb R$, "$\exp$ continue sur $\mathbb R$" implique "$\exp$ dérivable sur $\mathbb R$"…

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Il ne faut pas confondre implication et nécessité.

Il faut pour cela montrer que les hypothèses sont nécessaires : en retirer une change le résultat. Or si je ne suis pas petit, il y a toujours de la neige en Antartique. Donc l'hypothèse "être petit" n'est pas nécessaire.

Le travail de la causalité est plus profond que l'implication "à l'état brut". En général après un résultat de ce type, on retire une hypothèse et on essaye de trouver un contre-exemple pour montrer qu'effectivement l'hypothèse est nécessaire au résultat et qu'on ne peut pas faire autrement.

Si je ne suis pas petit, il y a toujours de la neige en Antarctique, donc cette hypothèse est inutile au résultat de la neige.

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Du coup, dire "dérivable implique continue" est une erreur de langage ?

Quel est le rapport entre l'implication dont on a l'habitude (la nécessité) et "non P ou Q" ?

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Si tu retires l'hypothèse de dérivabilité tu peux trouver un contre-exemple à la continuité, c'est donc une hypothèse suffisante : c'est une implication. Elle n'est pas nécessaire, par exemple les fonctions continues mais nul-part dérivables. Donc "dérivable" implique bien "continue".

Attention au vocabulaire, quand on dit "$P$ implique $Q$" ou de manière équivalente : non $P$ ou $Q$ ; $P$ est une condition suffisante à $Q$ et et $Q$ est une condition nécessaire à $P$.

Avoir $Q$ permet d'avoir $P$ (mais ne l'assure pas). Ne pas avoir $Q$ interdit d'avoir $P$ (si on considère l'implication vraie ofc).

J'ai peur de manquer de clarté, ce message en tout cas me parait plus explicite que celui d'avant :)

Donc "dérivable" implique bien "continue".

Holosmos

Mais d'après la table de vérité, "Je suis petit" implique "Il y a de la neige en Antartique". Alors qu'on n'a pas du tout la même relation de cause à effet qu'avec la dérivabilité et la continuité. A-t-on affaire à une faute de langage ?

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Ça dépend ce qu'on entend par "implication".

On peut dire : "infiniment dérivable, définie positive, paire" implique "continue". En soi c'est vrai mais ce n'est pas simple et faire des maths c'est justement simplifier ces situations : en trouver la (ou les) condition suffisante de manière stricte : en retirer une permet un contre-exemple.

Ce travail de contre-exemple est pas du tout fait en prépa et pourtant ça peut prendre au moins autant de temps que de démontrer le résultat "brut".

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Du coup, ce mot "implique" n'a pas vraiment de sens si on peut l'utiliser pour lier deux propositions alors qu'elles n'ont aucune relation de cause à effet.

Je comprends qu'au niveau logique c'est correct, mais qu'est-ce que ça induit en erreur ! oO

En fait, ça merde quand le membre de droite est toujours vrai.

Merci !

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En fait, je pense que la question que tu te poses vient du fait que tu tombes dans le panneau dont tu préviens tes lecteurs : la distinction entre cohérence (correction logique) et véracité (sens mathématique, ou commun, ou autre, selon un système axiomatique quelconque). "Je suis petit" implique "Il y a de la neige en Antarctique" : c'est vrai logiquement, c'est correct ; mais c'est dénué de sens et d'intérêt. Ton exemple sur $exp$ marche pareil : $exp$ continue $\Rightarrow$ $exp$ dérivable, c'est vrai en logique formelle, mais dénué du moindre intérêt mathématique puisque cela ne se généralise aucunement.

Edit : mais sinon oui, la définition logique de l'implication, ça va à l'encontre du sens commun et c'est bien relou. :D

Re-edit : ça merde aussi quand le membre de gauche est faux, hein… "Les corbeaux sont rouges" implique "Je suis Socrate". Okay, vrai, mais encore moins de sens. ^^

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Tu as raison. ^^

J'avais bien conscience de la distinction "véracité des propositions"/"justesse du raisonnement" — par exemple : "Tous les hommes sont bleus" $\Rightarrow$ ("Je suis un homme" $\Rightarrow$ "Je suis bleu") — mais pas de celle que tu mentionnes. Je vais en parler dans le tutoriel. :)

Pour le membre de gauche, j'avais pensé à mentionner "Le faux implique n'importe quoi", mais j'étais encore loin du compte. :P

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J'aime pas trop cette phrase "le faux implique n'importe quoi" parce qu'on identifie (à tort je pense) la flèche et la proposition "implication".

Le faux n'implique pas n'importe quoi, il n'y a pas réalisation de ce phénomène. Par contre "faux implique n'importe quoi" est logiquement vrai.

Le problème c'est vraiment la distinction entre syntaxe et sémantique, et dans tous les domaines où cette distinction se fait (je pense à la théorie des langages en informatique), se créent des ambiguïtés de langage, des abus et des raccourcis qui ne facilitent pas forcément la tâche. C'pour ça qu'il faut toujours être rigoureux.

(Mais philosophiquement Holosmos, on pourrait accepter de dire que le faux implique n'importe quoi ; mettons que je te dise, si la Terre est plate alors je suis en son centre. Pourquoi pas ? Tu n'as aucun moyen de me montrer que si la Terre n'était pas ronde comme on le sait bien, je ne définirais pas son centre ; c'est pas complètement invalide, même si ça n'a strictement aucun intérêt à part celui d'embrouiller les débutants en logique formelle.)

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@Alkareth : je ne dis pas que c'est faux … je dis que le verbe "impliquer" est mal utilisé : on confond la flèche et la proposition.

Il est évident que "faux implique n'importe quoi" est vraie en tant que proposition. Par contre le faux n'implique pas n'importe quoi : ce n'est pas parce que "faux" que le grand théorème de Fermat. Tu vois la nuance ?

Le problème est là, quand on utilise le verbe "impliquer" on dit que le fait $A$ implique le fait $B$, c'est-à-dire que si $A$ alors $B$.

Or "faux" n'est en rien une proposition, c'est une valeur de vérité, si "faux" alors … bah rien du tout, ça n'a pas de sens de chercher une implication au sens de la causalité (et non de la logique).

Attention au vocabulaire, quand on dit "$P$ implique $Q$" ou de manière équivalente : non $P$ ou $Q$ ; $P$ est une condition suffisante à $Q$ et et $Q$ est une condition nécessaire à $P$.

Holosmos

Pourtant, (non "Je suis petit" ou "Il y a de la neige en Antarctique") est vérifiée mais "Il y a de la neige en Antarctique" n'est pas une condition nécessaire à ma faible taille.

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En outre, l'implication peut être fausse tout en ayant des membres vrais. Par exemple, ("Je suis petit" implique "Il y a de la neige en Antarctique") est faux

Pourtant la table de vérité dit que c'est vrai… c'est un truc qui m'a toujours paru bizarre dans la notion d'implication.

Looping

Les joies de l'implication en logique classique. :) Dans une logique aussi simple, il n'y a pas vraiment moyen de parler de causalité ou de nécessité. Tu peux alors enrichir ta syntaxe et ta sémantique pour définir ces notions, et essayer de trouver des principes logiques satisfaisants (en cherchant un peu je suis tombé sur l'implication stricte, qui est un premier pas), mais c'est illusoire de vouloir parler de tout ça dans ce tutoriel. Je pense qu'une petite note invitant à réfléchir sur ce paradoxe suffirait amplement.

Attention au vocabulaire, quand on dit "$P$ implique $Q$" ou de manière équivalente : non $P$ ou $Q$ ; $P$ est une condition suffisante à $Q$ et et $Q$ est une condition nécessaire à $P$.

Holosmos

Pourtant, (non "Je suis petit" ou "Il y a de la neige en Antarctique") est vérifiée mais "Il y a de la neige en Antarctique" n'est pas une condition nécessaire à ma faible taille.

Vayel

Et bien si :). Si tu as l'implication tu as de manière équivalente ces deux relations.

C'est même assez simple : si "neige" est fausse, alors "non petit" doit être vrai et donc tu ne peux pas être petit. Ainsi pour être petit il faut nécessairement de la neige.

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Quelques petites idées au passage:
Je pense que tu peux enchainer avec les modes de démonstration, car elles sont intimenent liées à la table de vérité de l'implication:

P Q P ⇒ Q
0 0 1
0 1 1
1 0 0
1 1 1

  • le syllogisme (modus ponens): Si P est vraie et si P ⇒ Q est vraie, alors Q est vraie (l'exemple de "Socrate est mortel"). En effet, la seule ligne ou (P est vraie) et (P ⇒ Q est vraie), c'est la ligne ou Q est vraie.

  • le raisonnement par contraposée (modus tollens): P ⇒ Q équivaut à ¬Q ⇒ ¬P. si P ⇒ Q est vraie et que Q est fausse (contradictoire), alors P est fausse (première ligne du tableau).

  • le raisonnement par l'absurde: démontrer que Q est vraie en prouvant que la proposition ¬Q est fausse (tiers exclus) (grâce au raisonnement par contraposée)

Tu peux du coup parler des axiomes: les théorèmes sont liés entre eux par des chaines de démonstrations logiques, or il faut bien que ces chaines commencent quelque part, il y a donc un moment ou il faut considerer quelque chose comme vrai sans démonstration.

  • raisonnement par contre-exemple: pour démontrer que (P implique Q) est fausse, il suffit de trouver un exemple ou P est vrai et Q est faux (3eme ligne du tableau). Exemple: tous les cygnes sont blancs (cygnes => blancs). Il suffit de trouver un cygne noir pour démontrer que c'est faux. Mais trouver 2000 cygnes blancs ne permet pas de montrer que c'est vrai.

Application aux sciences expérimentales:
Les mathématiciens peuvent choisir leurs axiomes, alors que les autres scientifiques doivent confronter leurs axiomes à la réalité. On ne peut pas montrer que P implique Q (genre "l'énergie se conserve", "l'eau bout à 100 degrés"), il peut toujours survenir un contre-exemple. Quand une relation est mise en évidence un certain nombre de fois, on la considère comme un loi scientifique mais on ne peut pas dire qu'elle est vraie, on peut juste dire qu'elle sera fausse si on trouve un contre-exemple.

C'est la démarche que doit avoir un scientifique: quand il fait une expérience, ce n'est pas pour dire: si je trouve Q, ma loi P est vraie, mais plutôt si je trouve ¬Q, alors P sera fausse. Une loi scientifique doit donc être réfutable, c'est ce qu'on appelle le critère de réfutabilité de Popper (et hop, un peu d'épistémologie dans un cours de logique, la boucle est bouclée :) )

Petite erreur dans l'introduction : berné au lieu de berner.

Penses à utiliser \text{il existe} en LaTeX pour écrire du texte sans que ça soit mis sous forme de variable.

Tu peux donner des exercices à faire à la fin de chaque extrait (par exemple une table de vérité à compléter).

En introduction tu pourrais donner les limites du tutoriel et en conclusion ouvrir sur autre chose de plus intéressant qui vient continuer le tutoriel pour ceux qui sont encore sur leur faim.

Pour revenir à notre débat sur l'implication, j'ai trouvé ceci dans ce document: la notion de vérifonctionnalité.

Un connecteur logique est dit vérifonctionnel si la valeur de vérité d’une proposition construite à l’aide de ce connecteur dépend seulement de la valeur de vérité des propositions utilisées dans la construction.
Pour savoir, par exemple, si la proposition «p et q» est vraie, on n’a pas besoin de savoir exactement ce que cachent p et q — leur signification — on a juste besoin de connaître leurs valeurs de vérité respectives. Si les deux sont vraies, «p et q» est vraie, et si l’une est fausse, «p et q» est fausse. On peut résumer cela comme ci-contre au moyen d’une table de vérité.
En mathématiques, les connecteurs logiques utilisés sont tous vérifonctionnels.

Pour votre culture, remarquez bien que certains connecteurs logiques ne sont pas vérifonctionnels. C’est le cas du connecteur « parce que ». Imaginez un contexte dans lequel il est vrai que « Je me suis dépêché parce que j’étais en retard ». Les deux propositions « Je suis en retard » et « Je me suis dépêché » sont vraies. Pourtant, si on remplace « J’étais en retard » par « La glace est un solide » — proposition également vraie — la nouvelle proposition « Je me suis dépêché parce que la glace est un solide » est fausse. Or, si « parce que » était vérifonctionnel, cette proposition serait aussi vraie que celle dont nous sommes partis.

Une implication «p⇒q» peut être vraie alors que p et q n’ont rien de commun, car après tout seules leurs valeurs de vérité comptent — vérifonctionnalité oblige. Par exemple il est vrai que « Si 0 = 0, alors les oiseaux ont des plumes ».
Il en résulte, au contraire de ce que vous croyez sans doute, que l’implication n’a rien à voir avec la causalité du connecteur « parce que ». Dans «p⇒q», p n’est pas la cause de q, pas du tout. La proposition « S’il y a de la fumée, alors il y a du feu » est vraie, par exemple, et pourtant c’est le feu la cause et la fumée l’effet.

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