Suites numériques

Pour un mathématicien, une suite est un objet mathématique bien plus général que ce qu’on pourrait penser au premier abord. Pour en construire une, il suffit de prendre un certain nombre d’entités mathématiques et de les mettre dans un certain ordre : tel objet est le premier, tel autre le second, etc.

Suites : définition et construction

Pour créer une suite, on prend des objets mathématiques appartenant à un ensemble et on leur attribue à chacun un numéro (un entier naturel) :

  • les éléments de la suite sont appelés les termes ;
  • quand aux numéros, ils sont appelés indices ou rangs.

Ces numéros sont consécutifs, ce qui permet de mettre les entités dans l’ordre voulu. Ainsi, le nnème élément de la suite est le terme de rang nn : nous le noterons unu_n, alors que la suite en elle-même sera notée (un)(u_n).

Un exemple de suite
Un exemple de suite

Si la suite ne s’arrête pas, qu’elle a une longueur infinie, l’ensemble des numéros est l’ensemble des entiers positifs. Mais certaines suites ont une longueur finie, ce qui fait que l’ensemble des numéros est un sous-ensemble des entiers positifs. Il est même possible d’inventer des suites dont le premier rang est supérieur à 1 : le premier terme peut parfaitement être de rang 3, 9, 2798362, … Mais dans ce qui va suivre, nous n’allons pas utiliser ces suites : les suites seront de longueur infinie et le premier terme aura le rang 00 (parfois le rang 1).

Suites paramétrées

Pour construire une suite (un)(u_n), on peut préciser la valeur de chaque terme. Cette méthode utilise une fonction qui donne la valeur d’un terme en fonction de son rang, c’est-à-dire une fonction définie par un=f(n)u_n = f(n), comme f(n)=3n22n+4f(n) = 3n^2 - 2n + 4 ou f(n)=1nf(n) = \frac{1}{n}.

Expression paramétrée d'une suite
Expression paramétrée d’une suite

Suites récurrentes

On peut également définir une suite en exprimant chaque terme en fonction des précédents. Dans le cas le plus simple, on n’en considère qu’un seul : pour tout rang nn, un+1=f(un)u_{n+1} = f(u_n). Mais il est tout à fait possible d’en utiliser plusieurs. Ces suites sont dites récurrentes.

Cependant, plusieurs suites peuvent respecter la même relation entre un terme et les précédents. Par exemple, (2,6,18,54,)(2, 6, 18, 54,\ldots) et (1,3,9,27,)(1, 3, 9, 27,\ldots) vérifient toutes deux un+1=3unu_{n+1} = 3 u_n. C’est pourquoi il est nécessaire de spécifier les premiers termes. Plus précisément, si chaque terme de la suite dépend des nn termes précédents, il faut préciser les nn premiers termes : sans cela, on ne peut pas déterminer le terme de rang n+1n+1, ni les suivants.

Définition par récurrence d'une suite
Définition par récurrence d’une suite

Toutes les suites ne sont pas récurrentes, mais toutes admettent une expression paramétrée : il suffit pour la fournir, de regarder son premier terme, son second, etc. De plus, certaines suites récurrentes peuvent être « résolues », c’est-à-dire que la fonction correspondante fournit une expression du nnème terme en fonction de nn valable quelque soit le rang.

Suites numériques les plus courantes

Dans ce qui va suivre, nous parlerons essentiellement des suites de nombres réels, aussi appelées suites numériques. Nous allons d’abord passer en revue quelques suites courantes, certaines d’entre elles étant introduites par des exemples de la vie réelle.

Suites arithmétiques

Les suites arithmétiques sont des suites où les termes augmentent avec un pas régulier : on compte de 2 en 2, de 3 en 3, de 1.6 en 1.6, de 39 en 39, etc. Par exemple, dans la suite (3,7,11,15,19,23,)(3, 7, 11, 15, 19, 23, \ldots), chaque terme s’obtient en additionnant quatre au précédent. Ainsi, chaque terme s’obtient en additionnant une constante au terme précédent : un+1=un+ku_{n+1} = u_n + k. Cette constante kk, le pas de la suite, est appelée la raison de la suite. Celle-ci peut être aussi bien positive que négative, ce qui permet de construire des suites comme (8,5,2,1,4,7,10,)(8, 5, 2, -1, -4, -7, -10, \ldots).

Supposons que je connaisse le premier terme et la raison : comment obtenir le terme de rang nn ?

Prenons l’exemple de la suite de premier terme 142 et de raison 21, et faisons un tableau de ses premiers termes.

Rang Terme de la suite
0 142
1 142 + 21
2 (142 + 21) + 21
3 (142 + 21 + 21 + 21) + 21
4 (142 + 21 + 21 + 21 + 21) + 21
5 (142 + 21 + 21 + 21 + 21 + 21) + 21

Remplaçons les additions répétées par des multiplications.

Rang Terme de la suite
0 142142
1 142+1×21142 + 1 \times 21
2 142+2×21142 + 2 \times 21
3 142+3×21142 + 3 \times 21
4 142+4×21142 + 4 \times 21
5 142+5×21142 + 5 \times 21

On observe que chaque terme de la suite vaut exactement :

un=u0+nku_n = u_0 + n k

Supposons que je ne connaisse pas le premier terme, mais que je connaisse le terme de rang nn et la raison : comment obtenir le terme de rang mm ?

Pour cela, on peut réfléchir assez simplement :

  • pour arriver à mm, on fera mnm-n pas ;
  • chaque pas (on passe au terme suivant) ajoute la constante kk ;
  • on en déduit que la différence entre unu_n et umu_m vaudra donc k(mn)k(m-n).

um=un+k(mn).u_m = u_n + k(m-n).

Suites géométriques

Vous possédez tous un compte bancaire sur lequel vous épargnez votre argent (du moins, je vous le souhaite). Comme vous le savez peut-être, les comptes d’épargne sont rémunérés par des intérêts : vous touchez environ 2 à 3 % de la somme présente sur votre compte en intérêts, le pourcentage exact étant nommé le taux d’intérêt. Si vous n’ajoutez ni ne retirez d’argent sur votre compte, la somme totale présente sur votre compte augmente chaque année.

Quelle est la somme que vous aurez sur ce compte dans plusieurs années, connaissant la somme actuelle ?

Formalisons la situation : soit unu_n la somme d’argent présente sur votre compte nn années après le dépôt de l’argent. On pourrait croire que la suite est une suite arithmétique, mais les intérêts ne sont pas une somme fixe : pour un taux d’intérêt ii, la somme sur votre compte est multipliée par (1+i)(1 + i) chaque année. La suite obtenue est une suite géométrique, où chaque terme s’obtient en multipliant le terme précédent par une constante.

un+1=un×ku_{n+1} = u_n \times k

La constante kk est appelée la raison de la suite. Cette raison peut être positive, négative, fractionnaire, réelle, etc. Si la raison est négative, la suite est composée d’une succession de termes positifs et négatifs : un terme positif est intercalé entre deux négatifs, et réciproquement. Par exemple, on peut citer la suite (4,8,16,32,64,128,256,)(4, -8, 16, -32, 64, -128, 256,\ldots).

Supposons que je connaisse le premier terme et la raison : comment obtenir le terme de rang m ?

Il suffit d’utiliser un raisonnement similaire à celui montré plus haut avec les suites arithmétiques : remplacez les additions par des multiplications, les séries de multiplications répétées par des puissances, et vous obtiendrez la formule suivante : un=u0×knu_n = u_0 \times k^n.

Supposons que je connaisse pas le premier terme, mais que je connaisse le terme de position n et la raison : comment obtenir le terme de rang m ?

Vu que un=u0×knu_n = u_0 \times k^n, et um=u0×kmu_m = u_0 \times k^m, on a :

umun=u0×kmu0×kn=kmkn=kmn\dfrac{u_m}{u_n} = \dfrac{u_{0} \times k^{m}}{u_{0} \times k^{n}} = \dfrac{k^{m}}{k^{n}} = k^{m-n}

um=un×kmnu_m = u_n \times k^{m-n}

Suites arithmético-géométriques

Les suites arithmético-géométriques sont des généralisations des suites géométriques et arithmétiques. Avec ces suites, chaque terme se calcule en multipliant le précédent par une raison, et en ajoutant une constante additive :

un+1=un×r+ku_{n+1} = u_n \times r + k

Une suite arithmétique est un cas particulier de suite arithmético-géométrique, où r=1r = 1. Et une suite géométrique est un cas particulier de suite arithmético-géométrique, où k=0k = 0.

Puis-je obtenir une expression en fonction de nn d’une telle suite ?

Pour obtenir cette expression, nous allons déterminer la différence entre la suite arithmético-géométrique voulue et une suite géométrique de même raison et de premier terme identique. Ainsi, nous allons comparer :

  • une suite arithmético-géométrique définie par un+1=un×r+ku_{n+1} = u_n \times r + k ;
  • et la suite géométrique définie par vn+1=vn×rv_{n+1} = v_n \times r, avec u0=v0u_0 = v_0.
Rang Suite géométrique Suite arithmético-géométrique Différence entre les deux suites
0 v0v_0 u0u_0 00
1 v0rv_0 r u0r+ku_0 r + k kk
2 v0r2v_0 r^2 u0r2+kr+ku_0 r^2 + kr + k kr+kkr + k
3 v0r3v_0 r^3 u0r3+k2r+kr+ku_0 r^3 + k^{2}r + kr + k k2r+kr+kk^{2}r + kr + k
n v0rnv_0 r^n u0r5+knr+kn1r+...+k2r+kr+ku_0 r^5 + k^{n}r + k^{n-1}r + ...+ k^{2}r + kr + k knr+kn1r+...+k2r+kr+kk^{n}r + k^{n-1}r + ...+ k^{2}r + kr + k

On en déduit que le nnème terme de la suite arithmético-géométrique est simplement égal au terme de même rang de la suite géométrique u0rnu_0 r^n, auquel on ajoute knr+kn1r+...+k2r+kr+kk^{n}r + k^{n-1}r + ...+ k^{2}r + kr + k. On verra plus tard dans ce cours comment faire ce calcul. Tout ce qu’on peut dire, c’est que la formule vue plus haut se simplifie en :

(u0+r1k)rn+11k(u_0 + \frac{r}{1 - k}) r^n + \frac{1}{1 - k}

Mais ces observations et déductions à partir d’un exemple ne valent pas une démonstration. Pour en faire une, nous allons distinguer deux cas.

  • r=1r = 1

On a alors une bête suite arithmétique, et un=u0+knu_n = u_0 + kn.

  • r1r \neq 1

Cherchons un réel xx tel que :

x=xr+k.x = xr + k.

Comme r1r \neq 1, on peut diviser par 1r1 - r et :

x=k1r.x = \frac{k}{1-r}.

Une fois un tel réel obtenu, nous soustrayons l’équation précédente à la définition de la suite :

un+1x=(unr+k)(xr+k)=(unx)ru_{n+1} − x = (u_nr + k) - (xr + k) = (u_n − x) r

Que reconnaissez-vous ? Une suite géométrique, pardi ! On a donc :

unx=(u0x)rn.u_{n} − x = (u_0 − x) r^{n}.

Pour finir, on en déduit notre expression de unu_n :

un=(u0k1r)rn+k1r.u_{n} = (u_0 − \dfrac{k}{1-r}) r^{n} + \dfrac{k}{1-r}.

Ce qui est exactement l’équation que nous avions obtenue par observation.

Suites récurrentes linéaires

On peut généraliser encore les suites arithmético-géométriques, en prenant en compte plusieurs termes précédents : ce qui est fait avec le terme précédent peut aussi l’être avec les nn termes précédents, voire la totalité de ceux-ci.

Suite de Fibonnaci

La suite de ce genre la plus simple est la suite de Fibonnaci. Celle-ci est apparue pour la première fois dans un problème de mathématiques récréatives crée par Leonardo Fibonacci, qui donna son nom à cette suite. Le problème posait le contexte suivant :

  • le premier mois, nous plaçons un couple de deux lapins dans un enclos ;
  • un couple de lapin donne naissance à un petit après deux mois passés dans l’enclos ;
  • chaque couple capable de procréer donne naissance à un nouveau couple ;
  • enfin, comme les diamants, les lapins ne meurent jamais.

Combien il y a-t-il de couples de lapins dans l’enclos au n-ième mois ?

Pour le déterminer, on peut fabriquer une suite dont le n-ième terme donne le nombre de couples de lapins au n-ième mois : c’est la suite de Fibonnaci. On peut remarquer que le nombre de couples de lapins est égal au nombre de lapins qu’il y avait dans l’enclos l’année précédente, auquel il faut ajouter le nombre de couples formés par reproduction. Ce nombre de couples formés par reproduction est égal au nombre de couples qu’il y avait deux mois auparavant dans l’enclos. Ainsi, chaque terme est la somme des deux précédents.

un=un1+un2u_n = u_{n-1} + u_{n-2}

Ensuite, il faut remarquer une chose : au premier et second mois, on n’a qu’un seul couple de lapin, celui-ci mettant deux mois à se reproduire. Cette suite commence donc avec les entiers 0 et 1. La suite obtenue donne ceci : 1, 1, 2, 3, 5, 8, 13, 21, 34, 55, etc.

Allons plus loin

Là où on se contente d’additionner les deux termes précédents dans la suite de Fibonnaci, certaines suites additionnent un nombre de termes précédents plus important. Ainsi, rien ne nous empêche d’avoir une suite avec la relation de récurrence suivante : un=un1+un2+un3u_n = u_{n-1} + u_{n-2} + u_{n-3}. Une telle suite est appelée la suite de tribonacci. Et ce qui peut être fait avec les deux ou trois termes précédents peut l’être avec beaucoup plus de termes. On trouve ainsi des suites de pentabonacci, hexabonacci, octobonnaci, où chaque terme est la somme des 5, 6, 8 précédents.

On peut généraliser les suites précédentes, en ajoutant une possibilité : chaque terme précédent peut être multiplié par une constante bien précise dans le calcul du terme un+1u_{n+1}. En faisant cela, on obtient des suites récurrentes linéaires, ces suites où chaque terme est égal à la somme des termes précédents, chaque terme étant auparavant multiplié par un coefficient qui lui est propre :

un=(an1×un1)+(an2×un2)++(a1×u1)+(a0×u0)u_n = ( a_{n-1} \times u_{n-1} ) + ( a_{n-2} \times u_{n-2} ) + \ldots + (a_{1} \times u_{1} ) + ( a_{0} \times u_{0} )

Sens de variation et bornes d'une suite numérique

Les suites numériques ont souvent des propriétés que d’autres suites n’ont pas forcément, aussi nous allons voir ces propriétés.

Croissance, décroissance et monotonie

Prenons la suite arithmétique de raison 5 et de premier terme 20. Regardons comment évoluent les termes de la suite en fonction du rang.

Rang Termes de la suite
0 20
1 25
2 30
3 35
4 40
5 45
6 50
7 55

On remarque très rapidement que chaque terme de la suite est plus grand que le précédent. Dit autrement, pour tout rang nn, un+1>unu_{n+1} > u_{n}. Dans ces conditions, la suite est dite strictement croissante.

Maintenant, prenons une autre suite, qui attribue à chaque rang la puissance de deux qui lui est immédiatement inférieure ou égale.

Rang Termes de la suite
0 0
1 1
2 2
3 2
4 4
5 4
6 4
7 4
8 8
9 8
10 8

Cette suite n’est pas strictement croissante, vu que certains termes consécutifs sont égaux. Mais ses termes augmentent sans cesse quand le rang augmente. Dans ces conditions, la suite est dite croissante (mais elle n’est pas strictement croissante). Plus précisément, une suite est dite croissante si tout terme est supérieur ou égal au précédent : pour tout n, un+1unu_{n+1} ≥ u_n.

D’autres suites ne sont pas croissantes, ni strictement croissante, mais décroissantes ou strictement décroissantes. Une suite est dite décroissante si tout terme est inférieur ou égal au précédent : pour tout n, un+1 ≤ un. Si jamais tout terme est strictement inférieur au précédent, la suite est dite strictement décroissante : pour tout n, un+1 < un.

Maintenant, prenez n’importe quelle suite arithmétique : vous verrez qu’elles sont soit croissantes, soit décroissantes. Dit autrement, vous ne trouverez pas de suite arithmétique qui ne soit ni croissante, ni décroissante. Pour éviter de dire qu’une catégorie de suite est soit croissante, soit décroissante, on préfère dire qu’elle est monotone.

Mais est-ce que toutes les suites sont monotones ?

Prenez une suite géométrique dont la raison est négative et le premier terme non-nul, et regardez ce qui se passe. Par exemple, prenons la suite géométrique de raison -5 et de premier terme -2.

Rang Termes de la suite
0 -2
1 10
2 -50
3 250
4 -6250
5 31250

Cette suite n’est clairement pas monotone, et ce ne sont pas les seules.

Comment savoir si une suite est monotone ?

Il n’y a pas vraiment de méthode générale, mais quelques méthodes qui peuvent marcher dans certaines situations.

Une de ces méthode est simplement de calculer de manière générale un+1unu_{n+1} - u_n, et de regarder si le résultat est toujours positif ou toujours négatif :

  • si cette différence est toujours positive, la suite est croissante ;
  • si la différence est toujours négative, la suite est décroissante ;
  • si elle peut être autant positive que négative, on ne peut rien dire.

Bornes d’une suite

Maintenant, il est intéressant de regarder quelles sont les bornes d’une suite. Si vous regardez bien, les valeurs des termes d’une suite peuvent parfois être encadrés dans un intervalle bien précis : la suite ne contient aucun terme en dehors de cet intervalle. Mais pour d’autres, ce n’est pas du tout le cas. Dans ce qui va suivre, nous allons étudier un petit peu quelles sont les bornes d’une suite.

Une suite peut être :

  • minorée ;
  • majorée ;
  • ou bornée.

Une suite majorée est une suite dont tous les termes sont inférieurs ou égaux à un majorant : pour tout unu_n de la suite, on a unku_n \leq k avec kk un majorant. On peut noter que si une suite admet un majorant, elle en admet une infinité : une suite majorée par 5 l’est aussi par 6, 7, 8, 25, 1567496, etc. Parmi tous ces majorants, il en existe un plus petit majorant, dont la valeur est inférieure à celle de tous les autres. On appelle ce majorant : la borne supérieure.

Une suite minorée est une suite où tous les termes sont supérieurs ou égaux à un minorant : pour tout unu_n dans la suite, on a unku_n \geq k avec kk le minorant choisi. On peut noter que si une suite admet un minorant, elle en admet une infinité : une suite minorée par 5 l’est aussi par 4, 3, 2, etc. Là encore, il existe un plus grand minorant : c’est la borne inférieure.

Une suite bornée est une suite qui est à la fois minorée et majorée. En clair, tous les termes de la suite sont pris dans un intervalle, et plus précisément un intervalle dont les deux bornes sont des nombres réels.

Limites de suites

Les suites sont souvent étudiées pour savoir comment celles-ci se comportent quand le rang augmente et devient très très grand. Et autant prévenir : certaines suites peuvent donner du fil à retordre aux mathématiciens. Un bon exemple est celui de la suite de Syracuse, définie par la relation de récurrence suivante :

  • si unu_n est pair, on obtient un+1u_{n+1} en divisant unu_n par deux ;
  • sinon, on multiplie unu_n par 33 et on ajoute 11.

Si vous essayez avec le premier terme de votre choix, vous aurez de très fortes chances que cette suite se stabilise au bout d’un certain temps : la fin de la suite sera une succession de 1,4,2,1,4,2… Mais aucun mathématicien n’a réussi à le démontrer à l’heure où j’écris ces lignes (fin 2015).

Limite d’une suite

Mais toutes les suites ne finissent pas par une répétition périodique d’un même motif, comme la suite de Syracuse. Par exemple, la suite des nombres entiers définie par un=nu_n = n voit son terme général grandir de plus en plus avec le rang nn. Prenons comme autre exemple la suite définie par un=1/(n+1)u_n = 1/(n+1) et regardons ses premières valeurs. On remarque que les termes de la suite semblent se rapprocher d’autant plus de 00 que nn est grand.

Rang Terme de la suite
0 1
1 0,5
2 0,33333
3 0,25
4 0,2
5 0,16666666
6 0,1428
7 0,125

Les deux suites présentées ont donc des comportements très différents quand on augmente le rang : l’une semble se rapprocher de plus en plus d’une valeur finie, tandis que l’autre semble se rapprocher de l’infini.

Pour étudier le comportement d’une suite quand le rang nn « tend » de l’infini (le comportement asymptotique), on doit utiliser ce qu’on appelle la limite de la suite, qui correspond plus ou moins à la valeur vers laquelle un terme de la suite tend quand on augmente le rang. Pour introduire cet outil, on va distinguer trois cas de figures :

  • la suite « tend » vers une valeur finie : une suite constante, par exemple ;
  • la suite « tend » vers une valeur infinie : par exemple avec le cas un=nu_n = n ou un=nu_n = -n) ;
  • la suite ne « tend » pas vers une valeur précise : un exemple serait la suite définie par un=(1)nu_n = (-1)^n.
Convergence

Supposons que la suite de terme général unu_n « tende » vers un réel fini, que nous noterons ll. Intuitivement, plus nn grandit, plus la différence unlu_n-l est petite. En termes plus précis, cela signifie que pour tout e>0e>0 (que l’on souhaite prendre très petit), il existe une certaine valeur kk telle que pour tout n>kn>k on ait un]le,l+e[.u_n \in ]l-e, l+e[.. Lorsqu’un tel ll existe, on dit que unu_n converge vers ll.

Divergence

Supposons maintenant que unu_n « tende » vers ++\infty. Concrètement, il est impossible « d’enfermer » les termes unu_n dans un intervalle : il existera toujours des termes qui seront plus grand qu’une valeur constante fixée et ils le seront tous à partir d’un certain rang. Formellement, pour tout nombre MM tel que M>0M>0, il existe un rang kk tel que pour tout n>kn>k on ait un>Mu_n > M. Dans un tel cas de figure, on dit que la suite diverge vers ++\infty.

Le cas où unu_n « tend » vers -\infty est très analogue ! Au lieu de demander un>Mu_n > M on va demander un<Mu_n < -M ce qui revient à dire que pour toute constante choisie, il existe des termes qui seront plus petits que cette constante et qui le seront tous à partir d’un certain rang.

Il existe cependant des situations où la suite ne « tend » pas vers une valeur précise. La suite définie par un=(1)nu_n = (-1)^n en est un bon exemple : ses termes oscillent entre les deux valeurs -1 et 1. Il existe d’autres suites du même genre qui n’ont tout simplement pas de limite.

Déterminer la convergence d’une suite

Comment démontrer la convergence d’une suite ?

Il y a bien un critère relativement général qui permet de savoir si une suite numérique convergence : il s’agit du critère de Cauchy. Mais attention, ce critère ne vaut que pour les suites numériques dont tous les termes sont réels.

Critère de Cauchy

Augustin Louis Cauchy était un mathématicien qui a beaucoup travaillé sur les suites. Nous rencontrerons beaucoup de résultats qui portent son nom. Pour le moment, nous allons voir un résultat que Cauchy a obtenu en étudiant des suites basées sur des fonctions trigonométriques, mais qui se généralise à toute suite réelle.

Cauchy étudia des suites qui portent aujourd’hui son nom : les suites de Cauchy. Ces suites ont des termes qui deviennent de plus en plus proches au fur et à mesure que le rang augmente : leur différence tend vers zéro. Dit autrement, si on pose un nombre réel ϵ\epsilon aussi petit qu’on veut, il existe toujours un rang où la différence entre deux termes de rang supérieur est inférieure à cet ϵ\epsilon. Notons que les deux termes de rang supérieur ne sont pas forcément consécutifs. Cauchy a réussit à démontrer que toute suite réelle convergente est une suite de Cauchy. Et la réciproque est vraie, pour les suites réelles : si une suite réelle est une suite de Cauchy, alors elle converge.

Suites monotones

La convergence d’une suite monotone dépend de :

  • si la suite est croissante ou décroissante ;
  • si la suite admet un majorant ou un minorant.

Suite

Croissante

Décroissante

Admet un minorant mais pas de majorant

++\infty

Limite égale à la borne inférieure

Admet un majorant mais pas de minorant

Limite égale à la borne supérieure

-\infty

Théorème des gendarmes

Enfin, nous allons vous présenter une dernière méthode, basée sur le théorème des gendarmes. Celui-ci faut intervenir trois suites : deux suites (un)(u_n) et (vn)(v_n) qui ont la même limite ll, et une troisième suite (wn)(w_n) dont la limite est inconnue. Maintenant, imaginons que la troisième suite est encadrée entre les deux autres : au-delà d’un certain rang, unwnvnu_n \leq w_n \leq v_n. Dans ce cas, on peut affirmer que les trois suites ont la même limite ll.