« GNU Terry Pratchett »

Quand un roman devient réalité

Terry Pratchett

Le 12 mars 2015 – il y a dix ans à l’heure où j’écris ces lignes –, l’auteur britannique Terry Pratchett nous a quittés.

Beaucoup des romans de son cycle « les annales du Disque-Monde » traitent à la sauce Fantasy des thèmes tout à fait actuels ; l’un d’entre eux, « Timbré » (Going Postal), fait référence à Internet via ce qui est – dans le roman – un réseau de sémaphores.

Or, les opérateurs de ce réseau ont une pratique qui existe maintenant dans la réalité, de nos jours…

Des métadonnées dans des sémaphores

Les opérateurs des sémaphores utilisent des codes, désignés par une lettre, pour savoir que faire des messages qui circulent sur le réseau. Parmi ceux-ci :

  • G signifie « Transmettre ce message à la station suivante » ;
  • N signifie « Ne pas enregistrer le message » (dans le sens : ne pas en laisser de trace dans les archives du sémaphore) ;
  • U signifie « En fin de ligne, renvoyer le message dans l’autre sens ».

Un message (un « clack » dans le langage du roman) tagué GNU est donc un message fantôme qui va circuler lorsqu’aucun autre message est prioritaire, à l’infini, sans jamais être tracé nulle part.

Or :

A man is not dead while his name is still spoken.

Going Postal, Chapter 4 prologue

Ces messages GNU sont utilisés par les opérateurs du réseau pour rendre hommage à leurs morts : tant que les tours des sémaphores fonctionneront, ces messages circuleront et, métaphoriquement, les morts ne le seront pas.

Des métadonnées dans le HTML

Le protocole HTTP lui-aussi utilise (massivement) des métadonnées. En particulier, chaque requête et chaque réponse HTTP peut être munie d’en-têtes.

Par exemple, le navigateur peut indiquer les langues comprises par l’utilisateur avec Accept-Language: en,fr-FR;q=0.8,fr;q=0.5,en-US;q=0.3 et le serveur peut indiquer le type exact de contenu servi avec content-type: text/html; charset=utf-8.

Certaines d’entre elles sont standard, mais le protocole prévoit que l’on puisse envoyer n’importe quoi, en utilisant le préfixe X-. Si le client ou le navigateur rencontrent une en-tête inconnue, ils l’ignorent.

« GNU Terry Pratchett »

À la disparition de Terry Pratchett, des informaticiens ont eu l’idée d’appliquer l’idée du roman « Timbré » au protocole HTTP.

L’en-tête HTTP x-clacks-overhead (non officielle) a été créée pour indiquer, en substance : « Ce qui suit est un en-tête de clacks » ; il est utilisé de la manière suivante : x-clacks-overhead: GNU Terry Pratchett – les métadonnées HTTP, les codes de sémaphores tirés du roman, et le message à faire circuler.

Ainsi, le nom de Terry Pratchett circule à l’infini sur Internet. Son nom est cité, il ne mourra pas.

x-clacks-overhead: GNU Terry Pratchett est servi par Zeste de Savoir ainsi que par tous les sites de votre serviteur.

Il y a un site dédié sur l’ajout de cet en-tête à vos propres services.

Bonus : lire Pratchett

D’une façon générale : en français – à moins d’être parfaitement bilingue et d’avoir une excellente connaissance de la culture anglaise. Les livres de Terry Pratchett ont une langue complexe, sont bourrés de références, et ont été superbement traduits par Patrick Couton. Ça serait dommage de passer à côté de beaucoup de choses par refus d’office des traductions.

Concernant le Disque-Monde, personnellement je déconseille l’ordre chronologique parce que les tout premiers tomes sont moins « grand public » et moins réussis que les suivants, et parce que ça fait se mélanger les différents cycles. L’article Wikipedia et le graphique suivant permettent de s’y retrouver :

D’une manière générale les meilleurs volumes sont ceux de milieu de cycle ; dans les premiers l’univers et l’écriture ne sont pas encore stabilisés, dans les derniers les effets de la maladie de l’auteur se font sentir.

Outre le Disque-Monde, Terry Pratchett a écrit d’autres ouvrages.

De bons présages est excellent, mais a été coécrit avec Neil Gaiman. La Face obscure du Soleil et Strate-à-gemmes sont deux œuvres de jeunesse qui n’intéresseront que les fans (et honnêtement, c’est pas très bon). Je ne connais pas ses autres productions.


Icône : Sir Terry Pratchett, 12 octobre 2012, photo d’après CC-BY 3.0 Luigi Novi.

3 commentaires

En réalité ça dépend de ce que tu as l’habitude de lire.

Le conseil est plutôt valable pour les gens qui lisent peu, ou qui lisent peu de fantasy, ou qui sont habitués à ces séries qui ne sont compréhensibles que dans l’ordre. Le problème c’est que les premiers romans sont plus opaques que la suite (typiquement, « La huitième couleur » sans avoir déjà des notions solides de fantasy et/ou de jeu de rôles, c’est pas très intéressant) et donc c’est dommage de passer à côté. C’est intéressant aussi de savoir que qu’on ne perds pas grand-chose à lire les romans dans le désordre (tant que les séries thématiques le sont), ça donne de la souplesse par rapport à ses envies, et ça évite de bloquer sur un roman qu’on aime moins en se disant « si je le zappe je comprendrai plus rien à la suite ».

Pour les gros lecteurs, en particulier les habitués de fantasy que ça ne dérange pas de lire des séries à rallonge, l’ordre chronologique a son intérêt.

Merci pour ce billet. Je ne connaissais pas du tout, c’est un très bel hommage à cet auteur. :)

Tu m’as donné envie de me plonger dans l’univers du disque-monde, qui m’a toujours un peu fait peur par sa densité !

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