Devenir Belge, une fois

L'acquisition de la double nationalité pour un Français

La nationalité est un concept étonnant. Symbole fort de la souveraineté d’un État, il peut établir ses propres règles pour l’acquérir. Techniquement rien n’empêche un État de conférer une nationalité à un individu sans respecter les règles habituelles, pour peu que le dirigeant du pays puisse contourner les mesures.

On acquiert souvent une nationalité voire plusieurs à la naissance, et cela va souvent guider notre vie. Cela va participer à nous ancrer dans une culture, nous donner des droits mais des devoirs aussi. Ce bout de papier va conditionner très probablement l’équipe sportive qu’on va supporter corps et âmes, et à l’inverse rejeter des personnes dans la misère et cataloguer leur comportement à priori sur base uniquement de ce bout de papier.

Parce que cette nationalité accorde des droits, elle donne un cadre législatif pour un citoyen, mais surtout la protection d’un État au sein de son territoire mais aussi à l’étranger. De part l’importance administrative et concrète d’avoir une nationalité, une convention internationale existe pour limiter les cas où un citoyen serait apatride, c’est-à-dire sans nationalité. Les États signataires doivent donc mettre en place des mesures pour éviter ces cas de figures.

Cependant la nationalité est aussi un concept fondateur d’une nation et soulève de nombreuses questions. Certains refusent la bi-nationalité comme Monaco où être monégasque est une nationalité exclusive, d’autres comme la Belgique ne l’autorisent que pour certaines nationalités, d’autres sont bien plus libres que cela. Il est même théoriquement possible d’avoir plus de 4 nationalités si on remplie les conditions nécessaires. La peur de la double allégeance ou d’attirer des étrangers sur leur territoire explique sans doute en partie ces phénomènes.

De part mon histoire, je suis né Français, né et vivant jusqu’à 2 ans après mes études en France pour m’installer en Belgique avec ma femme Belge et mes enfants franco-belges. J’ai décidé de sauter le pas 6 ans après pour devenir franco belge à mon tour. Cet article raconte mon histoire.

Pourquoi devenir Belge ?

C’est une question qu’on m’a beaucoup posé à dire vrai. Déjà les démarches administratives demandent de justifier cette décision mais mon entourage se pose souvent cette question car la pratique n’est pas si courante que ça dans mon entourage d’une part, mais aussi car les gains sont plutôt faibles d’un point de vue pratique. Par ailleurs pour beaucoup de personnes qui ont vécu dans leur pays de naissance toute leur vie, le concept d’acquérir une autre nationalité est souvent difficile à appréhender.

Je vais donc donner des éléments qui m’ont poussé à le faire. Évidemment cette décision est propre à chacun et je ne juge pas les motifs des autres.

Ma première raison est du point de vue du respect familial et culturel en fait. De manière générale, c’est une question d’intégration. J’ai épousé une Belge, ma belle famille est Belge aussi, mes filles sont franco-belges, je vis en Belgique, j’ai acheté ma maison en Belgique, je travaille en Belgique, je baigne donc dans une culture Belge même si j’ai évidemment mes racines françaises que je ne renie absolument pas.

Pour moi il est important de montrer que j’embrasse cette adoption de la culture belge en prenant la nationalité, car ça demande du temps, des ressources mais aussi donne des droits et devoirs ce qu’on verra en détail après. Ne plus passer pour le Français ou l’étranger de service c’est toujours un plus même si globalement cela n’a jamais été un vrai problème dans mon cas personnel, notamment au travail. Mais je pense que pour d’autres cela est malheureusement moins vrai. J’estime ainsi montrer mon respect pour la culture de ma terre d’accueil et de ma belle famille car j’en fais mienne, à côté de celle de ma naissance.

De manière plus politique et général, je suis un européen fédéraliste convaincu. Je crois en la culture européenne et en une identité européenne qui dépasse la France et la Belgique, même si chaque État a ses particularités aussi. Donc adopter une nationalité européenne pour moi logique, je n’ai pas le même attachement à la France que beaucoup de Français à cet égard.

Au niveau politique cela donne des droits. Grâce à l’Union Européenne depuis le traité de Maastrich en 1992 la différence entre locaux et citoyens européens est faible de ce côté là tant qu’on vit dans le pays. En droit social, du travail, liberté de circulation, etc. Mais tout d’abord l’Union Européenne n’est pas fixe, le Royaume-Uni avec le Brexit a poussé de nombreux britanniques (installés notamment en France) et européens (installés au Royaume-Uni) à obtenir une nationalité pour conserver ces droits. Et ensuite certaines différences existent. Certaines professions exigent plus ou moins la nationalité locale bien que cela ne me concerne pas, mais surtout au niveau politique je n’ai le droit de voter… qu’aux élections communales et évidemment aux européennes. Cela signifie que si je peux donner ma préférence pour le bourgmestre (l’équivalent du maire pour une commune), je ne peux pas participer aux élections nationales, régionales et provinciales et donc donner ma préférence concernant la politique sur ces compétences. Le même problème se pose d’ailleurs en tant que candidat politique, mais comme cela ne m’intéresse pas cela ne me motive pas particulièrement.

Cela offre des garanties plus fortes sur le fait que la Belgique ne peut pas m’exclure du territoire, ni me priver des droits sociaux notamment au niveau de la santé ou en cas de perte d’emplois.. L’avenir étant toujours difficile à prédire, il vaut mieux être prudent parfois pour éviter les surprises.

Cependant, il ne faut pas regarder que les droits, il faut aussi regarder les devoirs. Devenir Belge signifie que je dois également répondre aux obligations qui concernent les autres Belges. Par exemple l’obligation du vote me concernera et je devrais voter à chaque scrutin belge. En cas de conflit armée la Belgique pourrait me mobiliser. Si le service militaire avait toujours lieu, j’aurais pu être sollicité à cette fin. Si la Belgique dispose de droit extra territorial concernant certains crimes ou pour le paiement de certains impôts, je pourrais être poursuivi par l’État belge à ce sujet, etc. C’est assez peu contraignant de manière concrète à ce jour, mais il est bon de garder ces éléments en tête quand même. Ce n’est pas anodin.

Pour ceux qui se posent la question, le scrutin des européennes je peux par ailleurs choisir si je vote comme Français de l’étranger ou comme Belge résident. Voter des deux côtés n’est heureusement pas possible en même temps.

Comment on devient Belge ?

Acquérir une nouvelle nationalité est essentiellement une affaire purement administrative en tout cas dans un État de droit. Cela peut être cependant long, contraignant et même coûteux.

Il y a de nombreuses possibilités pour devenir Belge même si la plupart concerne des cas très particuliers. Il y a même la possibilité de demander à la Chambre des représentants (l’équivalent de l’Assemblée Nationale) une naturalisation si on parvient à justifier pourquoi les procédures administratives ne nous correspondent pas et qu’on mérite pour autant de le devenir. Ce qui est le cas notamment pour les apatrides.

Le cas le plus simple pour un adulte est de passer par le travail ou en se mariant avec un Belge. Dans mon cas les deux s’appliquent bien.

Cependant il y a quelques conditions. Il faut démontrer qu’on connaît bien une des trois langues nationales (normalement niveau A2 suffit - ce qui est honnêtement un peu faible, c’est mon niveau de néerlandais par exemple et qui n’est pas très bon), il faut démontrer une intégration sociale qui peut passer par un certain nombre d’heures de formation, d’études ou de travail voire les trois à la fois, et résider 5 ans sans discontinuer en Belgique tout en ayant le permis de séjour illimité au moment de la demande. Ce dernier point est automatique pour un citoyen européen qui travaille en Belgique.

Travailler pendant 5 ans auprès du même employeur en CDI à temps plein règle en gros toutes ces questions à la fois ce qui est pratique. Pas besoin de démontrer un bon niveau en français, pas de soucis de transition entre employeurs qui peuvent rendre le dossier compliqué surtout s’il y a des trous, etc.

Une fois qu’on pense remplir les conditions nécessaires, il faut se renseigner sur les documents à fournir et la procédure. Et tout d’abord, il faut collecter les documents nécessaires.

La première chose qui frappe par rapport à la France en général à ce sujet là c’est la simplicité administrative. La commune sert de réel guichet unique entre le citoyen et l’État, l’avantage c’est que de nombreux documents ne sont pas à demander pour la procédure car l’État pourra retrouver le nécessaire lui même. Et il n’est pas nécessaire de contacter différents services non plus, la commune de résidence peut tout fournir.

Et cela se vérifie dès le départ. Je me suis marié à Marseille, en France, comme le mariage est situé à l’étranger je dois fournir une copie de l’acte de mariage intégral daté de moins de 3 mois à la Belgique. Cela n’aurait pas été nécessaire si le mariage avait lieu en Belgique. Mais si à l’inverse ma femme voulait demander la nationalité française, elle devrait quand même demander le papier à la commune de Marseille pour la procédure car la France l’exige. Par ailleurs, en dehors de la copie de la carte d’identité de ma femme, rien n’est nécessaire la concernant car ils ont les documents concernant sa naissance, sa nationalité, etc.

Et comme suis né à Toulon, je dois demander une copie de mon acte de naissance intégral à la commune de… Toulon. Heureusement grâce à la numérisation les demandes de documents à Marseille et Toulon sont simples, rapides et gratuits sans quitter son ordinateur. On reçoit le tout par la poste en moins d’une semaine dans mon cas. Mais il est donc nécessaire de le demander à la bonne commune soi même…

Il faut évidemment une copie de mon contrat de travail (rédigé en néerlandais mais ça n’a pas d’importance, même si les employés de ma commune ne maitrisent pas bien la langue manifestement). Pour prouver le nombre d’heures travaillé durant ces 5 ans, chaque année l’employeur envoie une fiche fiscal au ministère des Finances qui récapitule tout ce qui a été presté et payé. L’avantage c’est que cela permet de compléter la fiche d’imposition facilement, mais ici cela peut servir de preuve suffisante pour démontrer que je remplie les critères d’heures de travail sans problèmes avec une fiche par an. Cela évite de donner la feuille d’imposition ou l’ensemble des fiches de paie.

De manière analogue, en Belgique on déclare notre adresse de résidence à la commune où on habite après un déménagement. Ensuite la police locale vient vérifier dans les semaines suivantes qu’on y vit bien. Cela permet à l’État de savoir où réside la population et ici ça sert aussi de "preuves" que je vis bien avec ma femme durant ces années là plutôt que de reposer le tout sur des factures aux deux noms comme l’exigence la France. C’est bien plus simple et ces documents sont évidemment disponibles au niveau communal qui ne les réclame donc pas au citoyen.

Me voilà avec quelques documents en main, je peux aller voir la commune pour démarrer la procédure. Je prends place devant une employée communale qui revoit avec moi les conditions, les papiers dont je dispose, etc. Globalement la procédure peut démarrer car l’ensemble des pièces sont là et les conditions sont remplies. Elle les récupère pour constituer mon dossier.

Cependant comme je demande la nationalité en juin et que mes fiches fiscaux couvrent que jusqu’au mois de décembre de l’année dernière, l’employée communale me demande une attestation de l’employeur comme quoi je travaille bien encore pour lui. Ce n’est pas obligatoire, mais la procédure étant longue et payante, il vaut mieux éviter un refus pour des bêtises du genre. Mon employeur rédige cela en français, je le fourni à la commune le lendemain. De retour à la maison, coup de fil de la commune, il y a un soucis, mon employeur a fait une petite faute en accordant le verbe au passé et non au présent. Après tout, il est néerlandophone et le reste du texte est plutôt bon. Donc je dois au choix lui demander de le modifier ou alors de fournir la dernière fiche de paie en plus ce que j’ai choisi de faire pour éviter de le gêner. Retour à la commune pour fournir ce document.

Je lui demande quand même si tout cela est bien nécessaire, elle me confirme avoir eu un cas où un employé a changé d’employeur durant les 5 ans de résidence avec un trou de quelques jours seulement entre les deux emplois et que cela a servi de motif de refus car il ne remplissait plus les conditions. C’est assez strict et l’employée semble préoccupée par éviter d’envoyer un dossier qui sera refusé. C’est louable même si sur le moment c’est pénible.

Après un peu plus d’une semaine, rendez-vous à la commune. Le dossier est complet, il faut maintenant payer 150€ auprès du ministère de la Justice les frais de la procédure. Et revenir avec le reçu officiel. Cela se fait par Internet, je reviens le lendemain avec le fameux reçu. L’employée valide mon dossier, me donne un autre reçu daté. À partir de ce moment, la Belgique a 4 mois pour refuser ou introduire une extension de la période d’examen de mon dossier. Sans nouvelles du procureur du Roi d’ici là, au bout de ces 4 mois je serais Belge automatiquement. Pour comparaison en France le délai est d’environ un an pour la procédure et ce n’est pas automatique, l’État doit remettre une réponse formelle.

Cependant cela n’est pas fini. Durant ces 4 mois il y a un entretien avec la police locale pour établir les motifs de la demande et quelques informations annexes.

Manque de chance, la police est passée chez moi quand j’étais en vacances. Ils ont laissé un papier me demandant de les rappeler à un numéro de téléphone sans préciser le motif dès que je le pouvais. Même si je me doutais de la raison, cela stresse un peu car le doute est possible. Et dommage, la policière en charge de mon dossier est en vacances quand je suis revenu. Donc il faut attendre un peu encore. On convient d’un rendez-vous au commissariat.

Le jour J, petit entretien avec la policière en charge de mon dossier. Outre la déclinaison de l’identité, le but est de justifier la démarche ce que j’explique avec les raisons évoquées plus haut. Son but est aussi de savoir mon intégration sociale. Je lui parle donc de mon travail, que ma fille va à l’école, de ma belle famille qu’on voit régulièrement, etc. Des banalités en somme. Et là, elle lâche sans pression la phrase suivante c’est une question plutôt destinée aux personnes qui viennent du Maghreb. Je tombe des nus d’une telle remarque mais bon, je ne tiens pas à avoir mon dossier refusé pour des conneries en relevant le propos, je garde mon calme et on continue.

L’entretien est globalement banal dans les questions puis au moment de conclure elle me demande si j’ai une identité religieuse ce qui avec la remarque précédente me fait aussi tiquer. De même, je donne la réelle réponse même si je doute du caractère légal de la question qui est de toute façon impertinente dans ce contexte. Elle me fait relire et signer le PV qui résume l’entretien, si la première remarque n’est pas présente (évidemment), la 2e y est donc au moins le procureur pourra voir s’il y a un problème ou pas avec ces questions. Cet entretien pourtant assez bateau m’a assez chamboulée par la vision de la policière mais bon.

En tout cas l’entretien n’a pas été trop poussé ou stressant comme certaines de mes connaissances ont pu me rapporter pour obtenir la nationalité française.

Et 2 mois plus tard, le délai est passé. J’appelle la commune pour savoir quoi faire, qui me dit de venir. Ma carte d’identification en tant que citoyen européen est échangée contre une carte d’identité belge. Et voilà, et je dois seulement contacter mon employeur pour mettre à jour cette information. Le numéro de sécurité sociale ne change pas, aucun service administratif à prévenir, le changement est effectif. Et pas de cérémonie non plus, ça fait un peu bizarre du coup. Mais c’est ainsi. Je suis franco-belge maintenant.

Et par rapport à la France ?

J’ai évoqué plus haut quelques éléments qui différencient la Belgique de la France pour obtenir la nationalité. Mais il y a d’autres éléments qui peuvent être mentionnés. Comme ma femme a débuté la procédure de son côté, j’ai quelques éléments en main.

Tout d’abord la France impose une charge administrative plus importante. Elle demande plus de documents, et l’absence de guichet unique rend la procédure plus pénible. Car évidemment les documents que la Belgique ne demandait pas concernant ma femme, je dois demander ces documents me concernant moi même auprès des bonnes administrations.

La France exige une lettre de motivation manuscrite pour justifier la démarche. Il ne manquerait plus qu’une analyse graphologique soit exigée. L’extrait de casier judiciaire des deux époux est également requis.

Une condition importante diverge entre la Belgique et la France. Pour la Belgique, il faut vivre 5 ans sans discontinuer sur le territoire national pour débuter la demande. La France ne s’en préoccupe pas dans le cadre du mariage. Le couple marié peut vivre à l’étranger durant 6 ans, ou 5 ans si le Français est enregistré dans les registres consulaires comme résident à l’étranger. D’où le fait que ma femme peut entamer la procédure.

Pour le niveau de français, il faut certifier un certain niveau (probablement A2 - B1). Pour ma femme cela peut passer par le fait qu’elle possède le diplôme CESS (équivalent du bac) après un enseignement francophone. Cependant, il faut passer par une procédure payante de 50€ environ via le service France Éducation. Globalement il faut fournir le diplôme et quelques éléments type relevé de notes pour certifier qu’elle a le niveau en langue. Autrement il faut passer par le passage d’un examen de langue certifié en langue française ce qui serait un peu ridicule dans son cas.

Je fais cette procédure pour elle mais l’interface web est mal foutue. Et malgré mes vérification, j’ignore pourquoi, la case "Demande en tant que réfugiée" était cochée. Elle n’avait évidemment pas ce statut. Du coup le verdict tombe une semaine après : dossier refusé car il manque les justificatifs concernant ce statut. J’envoie un courriel pour expliquer le problème et ne pas tenir compte de cela, ils ne veulent rien savoir, il faut recommencer la procédure et payer à nouveau 50€. Merci.

C’est un peu dommage que la reconnaissance d’un diplôme aussi banal entre deux pays européens et limitrophes qui partagent une langue commune ne soit pas plus simple voire standardisée. Avoir un diplôme de CESS devrait être suffisant sans passer par une procédure administrative additionnelle.

Globalement on en est là, et je sais que le temps d’attente est plus long côté France. Et de mes connaissances mariés à des non européennes qui ont fait la procédure, la dite procédure a un entretien qui peut être bien plus pénible que ce que j’ai vécu. Même si dans le cas de ma femme cela n’ira probablement pas si loin.

Les problématiques de l'accès de la procédure

On a pu voir que demander une nationalité n’était pas un acte si facile, cela reste très administratif avec beaucoup de documents et de jargons administratifs ou de droit à comprendre. On peut vite être perdu bien que de nos jours les sites web des états comme la Belgique ou la France et même d’associations permettent d’avoir une bonne clarification de ce qui est demandé.

Cependant dans ma demande j’ai évité un nid à problèmes : la langue. Ok, mon employeur qui a fait une faute de français dans le document car ce n’est pas sa langue maternelle ou l’employée communale qui a galéré à relire mon contrat de travail m’ont fait perdre un peu de temps mais guère plus. Car en fait tous mes documents étaient déjà rédigés dans les langues nationales de la Belgique à savoir le néerlandais et le français (n’ayant aucun document en allemand, on n’en parle pas).

La France est évidemment francophone donc tous mes papiers étaient en français. C’était simple et rapide. Par chance aussi, la poste française reste rapide en particulier pour délivrer des documents en Belgique. Car certains documents doivent dater de moins de trois mois, et c’est un problème pour d’autres.

Dans ce cas de figure, si par exemple mon acte de naissance était en anglais car je venais du Royaume-Uni, la Belgique n’accepterait pas le document tel quel. L’administration belge ne doit pas traiter des documents en langue étrangère, en tout cas dans ce genre de cas. Il faut donc faire traduire ces documents par un traducteur agrée et les faire certifier conforme. Cela prend du temps et cela coûte cher. Pour des langues un peu rare où le nombre de traducteurs agrées est faible, cela est un vrai problème. Cela peut ajouter des centaines voire milliers d’euros de coûts de procédure. Et parfois le délai d’attente (entre la poste d’un pays en développement à l’autre bout du monde + traduction), les trois mois de fraicheur de certains documents sont très difficiles à respecter.

Et c’est sans compter les différences administratives ou culturelles qui peuvent exister et rendre difficile la délivrance des documents souhaités par l’administration. Cela me rappelle la Belgique qui exigeait à ma femme vivant en France un justificatif de domicile provenant de la commune de Marseille qui certifie son lieu de résidence. En effet il fallait justifier le fait qu’elle ne pouvait pas voter en Belgique à ce moment là. Mais un tel document n’existe pas en France et la Belgique refusait les preuves françaises classiques à base de facture ou avis d’imposition. La solution était de l’inscrire au Consulat belge mais la commune où elle vivait avant insistait pour avoir un document qui n’existe pas en France et elle ne semblait pas en mesure de nous proposer cette solution de contournement d’elle même. C’est nous sommes qui avons trouvé la solution en contactant le Consulat belge à cet effet.

Et en plus de tout cela il reste un problème de racisme dans ce genre de procédure qui existe. La policière avec ses remarques en est un symptômes et malheureusement quelques personnes que je connais qui ont subi des interrogatoires assez pénibles me confortent dans cette problématique.

Par ailleurs en France il y a un autre problème d’accessibilité. En Belgique toutes les demandes peuvent se faire à la commune. En somme tout le monde peut faire la démarche à une dizaine de kilomètre maximum de l’administration. Dans mon cas je pouvais y aller à pied. C’est facile et pratique. En France cette procédure se fait auprès des plateforme de naturalisation. En somme les grosses préfectures du pays. Typiquement dans ma région de naissance c’est Nice ou Marseille seulement, si on vient du fin fond des Alpes à Briançon c’est minimum 3h de train ou de voiture pour s’y rendre. Ce n’est donc pas aussi pratique.

En tout cas obtenir une nationalité n’est clairement pas une démarche que je jugerais simple et la France semble particulièrement appliquée à mettre des bâtons dans les roues pour complexifier la procédure sans justifications.


Comme nous avons pu le voir, ce parcours n’est pas si simple bien que probablement relativement simple dans mon cas. La citoyenneté européenne, le fait d’être francophone venant d’un pays riche et voisin aide certainement. La Belgique n’est probablement pas le pays où acquérir la dite nationalité est la plus difficile, à bien des égards d’ailleurs la procédure française de son côté est plus pénible.

5 commentaires

(rédigé en néerlandais mais ça n’a pas d’importance, même si les employés de ma commune ne maitrisent pas bien la langue manifestement)

Hey ! Ne pas parler le néerlandais est une obligation ! :p

Le jour J, petit entretien avec la policière en charge de mon dossier. Outre la déclinaison de l’identité, le but est de justifier la démarche ce que j’explique avec les raisons évoquées plus haut. Son but est aussi de savoir mon intégration sociale. Je lui parle donc de mon travail, que ma fille va à l’école, de ma belle famille qu’on voit régulièrement, etc. Des banalités en somme. Et là, elle lâche sans pression la phrase suivante c’est une question plutôt destinée aux personnes qui viennent du Maghreb. Je tombe des nus d’une telle remarque mais bon, je ne tiens pas à avoir mon dossier refusé pour des conneries en relevant le propos, je garde mon calme et on continue.

Malheureusement, ça ne m’étonne pas. Il y a des cas de xénophobie latente dans les forces de l’ordre.

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As-tu dû faire un serment d’allégeance au Roi ? C’est une « démarche » (certes très symbolique) nécessaire pour l’obtention de la citoyenneté canadienne, d’après ce que nous avons compris. Je me demandais si d’autres monarchies avaient instauré quelque chose de semblable.

Malheureusement, ça ne m’étonne pas. Il y a des cas de xénophobie latente dans les forces de l’ordre.

Cela ne m’étonne pas, mais c’est autre chose de le voir en réel surtout qu’il n’y a pas vraiment de quoi justifier de tels propos dans mon cas. Elle pouvait juste le penser et garder cela pour elle.

As-tu dû faire un serment d’allégeance au Roi ?

Non, il est clair que la Belgique a peu de cérémonial autour comme je l’ai expliqué dans le billet. Il n’y a d’ailleurs ni cours ni questions sur le fonctionnement de la Belgique dans la procédure. Alors je ne trouve pas forcément pertinent de faire une interrogation surprise historique sur le pays, bien que certains pays le font je crois, mais ça pourrait être un plus de vérifier certaines choses mais surtout d’instruire les candidats à la nationalité.

Mais bon quand je vois le peu de connaissances que ma femme a de son pays natal car manifestement le cours d’histoire géo est assez mauvais de ce côté, je me dis que d’être plus exigeant vis à vis des étrangers serait un comble. :D

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Cela ne m’étonne pas, mais c’est autre chose de le voir en réel surtout qu’il n’y a pas vraiment de quoi justifier de tels propos dans mon cas. Elle pouvait juste le penser et garder cela pour elle.

En effet.

Oui, le fait est que la fraude : mariage frauduleux, faux citoyens UE, fin du droit de séjour octroyé à des réfugiés concerne notamment des personnes en provenance du Maghreb ou du Proche/Moyen-Orient (et qu’il y a donc une attention plus grande qui y est inéluctablement accordée, qu’on le veuille ou non), mais ce n’est pas limité à cela. Parmi les cas de faux citoyens UE, par exemple, il y a beaucoup de personnes qui viennent d’Amérique du Sud (qui utilisent ainsi de faux documents d’identité italiens, portugais ou encore espagnoles).

Mais c’est un indicateur patent du mode assez conservateur de pensée de certains membres des forces de l’ordre. Et c’est un problème parce que les dossiers qu’ils voient passer induit un biais de perception qui va créer ou conforter un sentiment xénophobe "sélectif", dirigé contre des personnes en provenance de certaines régions du monde et pas d’autres.

J’ai trop souvent (à mon goût) croisé des personnes (civils, comme policiers) tenant ce genre de réflexion et je me demande si mieux éduquer les gens sur les biais de perception ne serait pas une approche intéressante, car on me rétorque souvent "C’est ce que je pense, parce que c’est ce que je vois"…

Mais bon quand je vois le peu de connaissances que ma femme a de son pays natal car manifestement le cours d’histoire géo est assez mauvais de ce côté, je me dis que d’être plus exigeant vis à vis des étrangers serait un comble. :D

Pourtant, j’ai eu de bons cours et je n’ai pas vraiment été dans un lycée huppé.

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J’ai trop souvent (à mon goût) croisé des personnes (civils, comme policiers) tenant ce genre de réflexion et je me demande si mieux éduquer les gens sur les biais de perception ne serait pas une approche intéressante, car on me rétorque souvent "C’est ce que je pense, parce que c’est ce que je vois"…

Oui, il y a le biais de sélection, quand tu traites que des dossiers impliquant des étrangers de fait tu vas voir tous les soucis avec eux mais pas avec les locaux. En plus du gros facteur de confusion pour certains dossiers où le paramètre important n’est pas l’origine mais la pauvreté par exemple. Mais comme les deux sont très liés dans nos pays il est facile de les confondre.

Je pense que cela devrait être enseigné, à l’école (niveau lycée) et dans les professions ayant ce genre d’affaires à traiter comme la police mais aussi les magistrats.

Pourtant, j’ai eu de bons cours et je n’ai pas vraiment été dans un lycée huppé.

Alors je me base uniquement sur le retour de ma famille, dans ma génération 6 personnes différentes ayant eu différents profs, le programme semble faiblard là dessus. Mais les profs ayant de grandes libertés aussi, est-ce un problème de prof ou de programme ? Je ne sais pas, mais en tout cas ça fait beaucoup de monde qui semble avoir eu une culture historique du pays faible durant leur scolarité et c’est dommage. :(

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