Qu’est-ce qu’un contrat ? La question peut paraître simple au premier abord, chacun a au moins une vague idée de qu’est un contrat, pourtant c’est une notion primordiale en droit et très fréquente dans notre quotidien.
En effet, vous avez probablement contracter aujourd’hui sans lire ou signer le moindre document, comme le voudrait l’imaginaire collectif.
Lorsqu’on s’intéresse au droit français, on se reporte inévitablement aux différents Codes qui contiennent la majeure partie du droit applicable en France. D’ailleurs vous en connaissez sans doute au moins un, le fameux Code de la Route !
Aujourd’hui, il est possible de consulter l’ensemble de ces Codes gratuitement sur Internet via le site Legifrance
Concernant notre sujet du jour, les contrats, c’est aux articles du Code Civil (souvent abrégé en C.Civ) qu’il sera fréquemment fait référence dans ce billet.
Vous pourrez suivre ce billet sans vous en servir, je vous délivrerai toutes informations utiles, et sans connaissance juridique préalable. Les articles seront donnés à titre purement informatif.
Le fait juridique et l'acte juridique
Dans le but de définir et de comprendre ce qu’est un contrat, il est nécessaire de faire une première distinction, entre le fait juridique d’une part, et l’acte juridique d’autre part.
Le fait juridique
L’article 1100–2 du Code Civil définit le fait juridique de la manière suivante :
Les faits juridiques sont des agissements ou des événements auxquels la loi attache des effets de droit.
En outre, l’événement ou l’agissement qui produit les effets de droit peut être volontaire ou involontaire.
Voici deux exemples afin de mieux cerner cette définition :
- Le vol d’un objet, peu importe ce dont il s’agit, est un fait juridique volontaire. Le vol constitue l’agissement, et la sanction prévue par la loi est l’effet de droit attaché au vol.
Dans cette situation, la personne à l’origine du vol, le voleur, a volontairement commis le vol, en revanche il n’a pas souhaité la sanction mise en place par la loi, donc l’effet de droit.
- Une personne fait malencontreusement tomber l’ordinateur d’une autre personne qui était posé sur une table, il s’agit d’un fait juridique involontaire.
La personne à l’origine de la chute de l’objet devra rembourser son propriétaire comme l’exige la loi. Le remboursement du dommage causé est ici l’effet de droit.
Contrairement à la première situation, la personne mise en cause ici n’a souhaité ni abîmer l’ordinateur d’une autre personne, ni devoir le rembourser.
Dans ces deux situations, les événements produisent des conséquences imposées par la loi aux personnes.
L’acte juridique
L’acte juridique s’oppose au fait juridique et est défini de la manière suivante par l’article 1100–1 du Code Civil :
Les actes juridiques sont des manifestations de volonté destinées à produire des effets de droit. Ils peuvent être conventionnels ou unilatéraux.
Contrairement aux faits juridiques, les agissements ou événements sont volontaires, tout comme les effets de droit qui en découlent. Ces derniers sont une conséquence souhaitée.
À nouveau, deux exemples pour mieux comprendre cette notion :
-
La donation, par une personne à une autre, d’un bien quelconque, est volontaire, tout comme les effets de droit qu’elle produit.
Dans le cas présent, l’effet de droit est le transfert de propriété du bien. Autrement dit, la personne qui possédait le bien en perd la propriété par la donation. A contrario, la personne qui reçoit le bien en devient propriétaire grâce à cette même donation.
Le donateur, la personne qui donne le bien, donne son bien volontairement, et sait que par cette action elle va en perdre la propriété au profit de la personne qui reçoit le bien. L’effet de droit est donc bien désiré. -
Dans une vente entre deux personnes, le vendeur va perdre la propriété de l’objet qu’il vend en échange d’une contrepartie financière fournie par l’acheteur.
Comme pour la donation, il y a ici un transfert de propriété du vendeur à l’acheteur qui est un effet de droit souhaité, tout comme l’événement qui en est à l’origine, la vente dans le cas présent.
En résumé le fait juridique est volontaire ou involontaire, mais les effets de droit qui en découlent sont systématiquement involontaires, non souhaités. Au contraire, l’acte juridique est volontaire et les effets de droit qui en découlent le sont aussi.
Dans la définition de l’acte juridique, la dernière partie n’a pas encore été abordée. Il y est précisé que l’acte juridique peut être conventionnel ou unilatéral. C’est cette nouvelle distinction qui va nous intéresser à présent.
L’acte juridique unilatéral et l’acte juridique conventionnel
La différence entre ces deux types d’acte juridique dépend du nombre de personne(s) qui manifeste(nt) leur volonté.
Si une seule personne manifeste sa volonté, alors l’acte juridique est unilatéral. En revanche, si plusieurs personnes manifestent leur volonté, l’acte juridique est conventionnel.
Dans un testament par exemple, seul celui qui le rédige, le testateur, va manifester sa volonté. Le testament est donc un acte juridique unilatéral.
Néanmoins, dans une vente, le vendeur et l’acheteur manifeste tous les deux une volonté commune que la vente ait lieu. Il s’agit donc d’un acte juridique conventionnel.
Le contrat
Nous touchons au but. L’ensemble de ces distinctions étant faites, il est temps de s’intéresser à la définition du contrat, donnée par l’article 1101 du Code Civil, que voici :
Le contrat est un accord de volontés entre deux ou plusieurs personnes destiné à créer, modifier, transmettre ou éteindre des obligations.
À la lecture de cette définition, une évidence apparaît : le contrat est un type d’acte juridique, plus exactement un acte juridique conventionnel.
On peut identifier chacun des éléments que nous avons évoqués précédemment :
- l’accord de volonté qui suppose une manifestation de volonté, caractéristique d’un acte juridique,
- la création, la modification, la transmission ou l’extinction d’une obligation, donc la volonté de produire des effets de droit, autre caractéristique d’un acte juridique.
- la multiplicité de personnes, caractéristique d’un acte juridique conventionnel
Résumer en des termes plus communs, un contrat est un accord entre deux ou plusieurs personnes, qui va créer, modifier, transmettre ou mettre fin à des engagements, à l’égard d’au moins l’une de ces personnes.
Allons un peu plus loin : les différents types de contrat
Maintenant que nous avons déterminé ce qu’est un contrat de manière générale, il faut savoir que les contrats font l’objet d’une classification en fonction de certaines caractéristiques.
L’ensemble des classes de contrat ne seront pas abordées ici, seulement 4 le seront :
le contrat consensuel, le contrat solennel, le contrat de gré à gré et le contrat d’adhésion.
Ces classes sont en général regroupées par paire, il y a donc les contrats consensuels et contrats solennels d’une part, et les contrats de gré à gré et d’adhésion d’autre part.
Notez qu’un contrat peut appartenir à plusieurs classes lorsqu’elles ne sont pas dans la même paire.
Vous ne serez pas étonné d’apprendre que ces classifications et leurs définitions se trouvent dans le Code Civil.
Contrats consensuels et solennels
L’article 1109 de ce Code nous donne les définitions suivantes :
Le contrat est consensuel lorsqu’il se forme par le seul échange des consentements quel qu’en soit le mode d’expression.
Le contrat est solennel lorsque sa validité est subordonnée à des formes déterminées par la loi.
Les définitions sont assez limpides, le contrat solennel est celui pour lequel la loi impose des conditions de forme pour être valides. A contrario, les contrats consensuels n’exigent aucune condition de forme, ils peuvent aussi bien être établis sur un support électronique, que par écrit entre deux personnes, ou bien encore… à l’oral.
Les plus perspicaces auront fait le lien avec l’introduction de ce billet, et compris que le simple achat dans un magasin, dans un petit commerce, dans une boulangerie, etc. est en fait un contrat de vente verbal. Aussi, il est très fort probable que vous ayez conclu un contrat aujourd’hui sans même en avoir conscience.
Prenons à tout hasard l’exemple de l’achat de clémentines le matin au marché de votre ville. Il y a bien accord de votre part et de celle du marchand, ce dernier est d’accord pour vous transférer la propriété des clémentines, et vous êtes d’accord pour en payer le prix.
Contrats de gré à gré et contrats d’adhésion
Nous l’avons vu précédemment, la notion de volonté et la notion d’accord sont particulièrement importantes, ce sont là les principes de ce qui est nommée en droit la liberté contractuelle.
Vous avez la possibilité de contracter ou de ne pas contracter, la possibilité de choisir avec qui vous contracter, et enfin la possibilité de déterminer le contenu du contrat, du moins en principe.
Pourtant il ne vous aura pas échappé que bien souvent nous sommes confrontés à des contrats desquels le contenu est déjà établi, qu’il est seulement possible, soit d’accepter, soit de refuser.
C’est par exemple le cas des contrats qui vous lient à votre fournisseur d’accès à internet, à une compagnie de transport ou encore du contrat qui nous lie à (l’association) Zeste de Savoir !
Comme dit précédemment, un contrat peut cumuler plusieurs classes, le contrat qui nous lie à Zeste de Savoir est par exemple à la fois consensuel et d’adhésion.
Pour les plus curieux et / ou les plus motivés, voici les autres principales classes de contrat avec une description succincte :
À titre onéreux et à titre gratuit : le contrat est à titre gratuit si l’un des contractants fournit à l’autre quelque chose sans attendre ou recevoir contrepartie, qu’elle soit financière ou non. Dans le cas contraire, il est à titre onéreux. Celui qui nous lie à Zeste de Savoir est à titre gratuit par exemple.
À durée déterminée et à durée indéterminée : ces termes sont souvent utilisés lorsqu’on parle de contrat de travail, mais il s’applique en réalité à tout type de contrat. Soit les contractants s’engagent pour une certaine durée, donc une durée déterminée (1 an, 2 ans, etc.), soit ils ne mettent pas de limite temporelle à leur engagement, la durée est donc indéterminée.
À exécution successive et à exécution instantanée : le contrat est à exécution successive lorsque les obligations, les engagements des contractants s’étalent dans le temps. C’est le cas lorsque vous louez un appartement ou une maison sur le long terme, ou du contrat avec votre banque. En revanche, le contrat est à exécution instantanée lorsque l’engagement se produit en une fois, c’est le cas lorsque vous achetez un objet au comptant.
Commutatif ou aléatoire : le contrat est commutatif lorsqu’on sait ce que l’on va retirer du contrat. C’est le cas de la majorité des contrats au quotidien. L’exemple type du contrat aléatoire, dont on ne sait pas au moment de la signature ce qu’on va retirer, est le contrat d’assurance auto ou habitation. Tant qu’aucun sinistre n’est subi, l’assureur ne verse rien, mais la prime d’assurance est tout de même payée. Le versement d’une somme d’argent par l’assureur est subordonné à la survenance d’un événement incertain, en l’occurrence la survenance d’un sinistre.
D’accord, compris, mais pourquoi cette classification et toutes ces distinctions ?
Bonne question ! Les juristes s’ennuieraient-ils ? Hé bien, non. Ces distinctions ont pour but, comme bien souvent en droit, de permettre l’application de différents régimes.
Prenons l’exemple de la distinction entre un contrat à durée déterminée et un contrat à durée indéterminée. Dans le premier cas, les contractants devront en principe tenir l’ensemble de leur(s) engagement(s) pour la durée au fixée au contrat sous peine de sanction ou de pénalités. Dans le second cas, aucune limite temporelle n’étant fixée et les engagements perpétuels étant interdits en droit français, chacun des contractants peut mettre fin à tout moment au contrat sous réserve de respecter les délais de préavis prévus au contrat et en leur absence un délai raisonnable.
Pour terminer, je vous laisse maintenant vous amuser à déterminer combien de contrat vous avez conclu aujourd’hui, et quels sont leurs types.
C’est désormais la fin de ce billet que j’ai voulu faire court, centré sur l’essentiel, et qui, je l’espère, vous aura permis de mieux comprendre ce qu’est un contrat, et vous aura donné envie de vous intéresser au droit de manière plus approfondie.
Il s’agit de mon premier billet avec pour vocation de vulgariser et de transmettre du savoir, donc tout retour est le bienvenu, tant sur le fond que sur la forme.